La dernière décennie a vu l'Afrique devenir l'objet de la convoitise de toutes les grandes puissances mondiales. Dans cette course à la coopération stratégique, « l'ami chinois » a une longueur d'avance sur son rival et se fait remarquer par une présence massive dans tous les secteurs d'activité. Le Japon, logique prétendant aux faveurs du partenaire africain, au regard de sa position de troisième puissance économique, n’a pourtant commencé à rêver d’Afrique que très récemment.
Si le pays s’est doté d’un département africain dès les années 60, c’est seulement en 2001 qu’a eu lieu la première visite d’un chef de gouvernement japonais sur le continent. Cette situation a fait perdre beaucoup de terrain à Tokyo dans cette guerre d’influence, mais le pays du Soleil levant n’a pas dit son dernier mot…
Dans l’ombre du géant chinois
Les échanges commerciaux du Japon avec l’Afrique s’élevaient à 24 milliards $ en 2015, contre environ 179 milliards $ pour la Chine. Cette même année, la valeur des exportations chinoises sur le continent était onze fois supérieure à celle du Japon alors que seulement 1,4% des exportations japonaises étaient destinées au continent africain.
Près de 10 000 entreprises chinoises seraient présentes en Afrique, d’après un rapport du cabinet McKinsey. Face à elles, seulement 440 entreprises japonaises ont été répertoriées par le cabinet Africa Business Partners en Afrique. Celles-ci investissent principalement dans les mines, l’automobile, le pétrole et les infrastructures.
Près de 10 000 entreprises chinoises seraient présentes en Afrique, d’après un rapport du cabinet McKinsey. Face à elles, seulement 440 entreprises japonaises ont été répertoriées par le cabinet Africa Business Partners en Afrique.
De plus, seule une poignée de pays africains monopolisent les investissements japonais sur le continent. Ce qui contraste fortement avec la méthode chinoise qui a permis à Pékin d’étendre son influence sur la majorité des pays africains.
En 2015, l’Afrique du Sud, principal partenaire du Japon en Afrique, captait 70% des investissements directs étrangers (IDE) japonais sur le continent. D’ailleurs, le pays d’Afrique australe est celui qui attire le plus d’entreprises japonaises. Plus de 275 entreprises japonaises seraient présentes dans le pays contre 49 en Egypte et 47 au Kenya. Les pays francophones d’Afrique semblent encore très peu desservis par les entreprises japonaises, à l’image de la Côte d’Ivoire ou du Sénégal, qui n’attirent qu’une quinzaine d’entreprises nippones.
Cependant, plusieurs firmes japonaises ont mis en place des stratégies d’expansion progressive en Afrique. Parmi elles, figure le constructeur d’outils Komatsu, qui distribue des équipements de génie civil et des machines-outils dans plus de 14 pays africains.
L’entreprise Mitsui and Co., quant à elle, est présente à Accra, Casablanca, Nairobi, Maputo et Johannesburg. En 2015, la société spécialisée dans les infrastructures et l’énergie annonçait qu’elle s’implantera aussi en Côte d’Ivoire. Plusieurs autres entreprises telles que Sojitz, Sumitomo ou encore Mitsubishi sont présentes sur le continent, mais restent encore marginales par rapport aux firmes chinoises.
Mais l’une des plus emblématiques avancées japonaises en Afrique reste, en 2012, la prise de contrôle du groupe CFAO par Toyota Tsusho Corporation. Fondé en 1852, l’ancien fleuron français CFAO assure désormais au Japon une présence dans 26 pays africains, avec un vaste réseau de distribution automobile, pharmaceutique et de services technologiques, pour un chiffre d’affaires de 4,2 milliards $ réalisé à 80% en Afrique. A ses activités traditionnelles, le groupe ajoute désormais la grande distribution en association avec le groupe Carrefour, ansi que le développement des énergies renouvelables (solaire, éolien et geothermie).
Discret mais efficace
D’après le spécialiste Julien Kita de l'Institut français des relations internationales (Ifri), la part du continent africain dans l’aide publique au développement du Japon est passée de 2,2% en 1970, à environ 15,3% en 1989. Le journal Le Monde indiquait qu’en 2016, l’Afrique représentait désormais « 28 % de l’aide financière non remboursable, 15 % de la coopération technique et 4 % des prêts concessionnels consentis par le Japon ».
Le centre commercial Playce à Abidjan, co-entreprise franco-japonaise.
D’après le magazine Forbes, le Japon a multiplié par 14 ses investissements directs étrangers sur le continent entre 2000 et 2014. Les IDE japonais à destination de l’Afrique sont passés de 758 millions $ seulement en 2000 à 10,5 milliards $ en 2014.
Ces investissements sont essentiellement axés sur les infrastructures. En 2015 par exemple, le pays accordait un financement de 270 millions $ pour l’extension du port de Mombasa au Kenya. En janvier dernier, la Global Construction Review annonçait que deux des plus grandes entreprises japonaises s’apprêtaient à signer un contrat de 650 millions $ pour l’extension du port de Namibe en Angola.