L’opposition dite « radicale », composée du FNDU et du RFD, entend mettre en échec l’agenda du gouvernement déterminé à faire adopter, par le Parlement, les modifications constitutionnelles préconisées par l’accord du 20 Octobre dernier. D’autres partis importants de l’opposition dite modérée ont également émis des réserves, s’appuyant sur la demande des parties prenantes au dialogue d’Octobre dernier, de faire voter les amendements par le peuple mauritanien, via référendum. Le gouvernement estime, pour sa part, qu’une telle opération lui coûterait entre cinq et six milliards d’ouguiyas, un montant qu’il entend réserver, dit-il, aux secteurs de la santé et de l’éducation. Pour le pouvoir, le vote du Congrès, c’est le moyen le plus court et le moins coûteux, pour le budget de l’Etat. Le plus politiquement sûr, de surcroît : n’y dispose-t-il pas d’une majorité confortable, lui assurant les trois cinquièmes de suffrages exigés, par la loi fondamentale, pour se laisser amender ?
Pour les détracteurs de cette option, le congrès souffre de crédibilité. Les mandats des sénateurs sont arrivés à terme depuis des années, une entorse d’ailleurs épinglée, par le Conseil constitutionnel, depuis quelques mois. Ils y ajoutent que la chambre basse du Parlement manque, elle aussi, de représentativité, ayant été élue sans la participation d’une importante partie de l’opposition. Voilà pourquoi les partis dialoguistes qualifient-ils de « forcing » la décision du gouvernement. Iront-ils jusqu’à voter contre le texte ? On le saura le 11 Mars prochain.
Leurs divergences, autour de ces amendements constitutionnels, sont, en tout cas, en train d’entamer leur crédit, tout comme celui du gouvernement. L’adhésion du comité de mise en œuvre de l’accord du 20 Octobre, qui fonctionne selon la règle du consensus, est très loin d’être acquise. Le gouvernement promettra-t-il des postes de recasement ? Sortira-t-il ouvertement le chéquier, comme il a déjà délivré des terrains, aux parlementaires, pour gagner leur confiance et leur vote ? Un exercice de haute voltige, à tout le moins.
Après avoir décidé de boycotter le référendum – elle pensait qu’on s’acheminait vers cette option – l’opposition recadre son combat dans la résistance à toute modification de la Constitution. Elle a donc décidé de mener une vaste campagne de sensibilisation, auprès des députés, invités à ne pas voter les amendements, et auprès de l’opinion nationale, sur les risques que le gouvernement et son Parlement pourraient faire courir au pays. Grande marche et meeting à Nouakchott prévus le 11 Mars. La tension monte à nouveau, entre le gouvernement et son opposition dite « radicale ». Eviteront-ils la confrontation ?
Le Président courtise les parlementaires
Pour s’assurer du succès de son agenda, le président de la République est descendu dans l’arène. Il a organisé, mercredi dernier, un dîner pour les parlementaires de la majorité présidentielle. Occasion de rappeler ses réalisations, de réitérer qu’il ne briguerait pas de troisième mandat, d’égratigner nos voisins marocains et sénégalais qui ne ménagent aucun effort pour discréditer la Mauritanie et sa diplomatie. Répondant à une question d’un sénateur sur les élections municipales et législatives anticipées, à quelque deux ans de la fin du mandat des députés, Ould Abdel Aziz aurait avoué n’avoir jamais souhaité de tels scrutins, mais que c’est la volonté des parties prenantes au dernier dialogue.
Sans manquer de se déclarer, comme toujours, ouvert au dialogue avec « toute » l’opposition.
Un dialogue que tous les partis de l’arène politique prétendent également souhaiter mais qui peine toujours autant à prendre corps. Les rumeurs du contraire se sont répandues, il y a quelques jours, à Nouakchott, précisément à la veille de l’arrivée d’une délégation de l’Union Européenne pour une revue économique. Certains observateurs laissaient entendre que ce principal partenaire au développement du pays voudrait pousser le pouvoir et son opposition à la table des négociations, histoire d’éviter un nouveau boycott des élections.
DL (Le Calame)