Le Groupe national multipartite a finalement rendu son premier rapport 2018 mardi sous la supervision des ministres des pêches et des finances. Malgré le retard accusé, la production de ce premier rapport a nécessité la synergie de tous les acteurs du secteur.
C’est donc avec un grand « ouf » de soulagement que le Groupe National Multipartite lancé en 2017 dans le sillage de la création de FiTi (Initiative pour la transparence dans le secteur des pêches) a accouché mardi 18 mai 2021 de son premier rapport tant attendu. Une cérémonie à la mesure de l’événement a été présidée par le ministre des pêches et de l’économie maritime, Abdelaziz Ould Dahi, en présence de son homologue des finances, Mohamed Lemine Ould Dehbi. Le sceau historique de la publication de ce premier rapport n’a pas échappé au ministre des pêches pour qui d’emblée sa publication est un choix politique de bonne gouvernance des ressources que le gouvernement tente d’imprimer à leur gestion. Mais outre, le leadership du pays dans la quête de la transparence dans les régions du Monde Arabe et de l’Afrique de l’Ouest, pour le ministre, le rapport permet ainsi au citoyen mauritanien « d’avoir un accès facile aux données relatives à la gestion de ce secteur important ».
Le péché originel !
En remplissant 2018 les conditions d’adhésion volontaire à la FiTi dont elle a abrité et parrainé la mise en place, la Mauritanie était attendue sur son premier rapport de transparence suivant les normes exigées. Un travail de longue haleine parfois même fastidieux mais inéluctable pour obtenir le label de la transparence dans la gouvernance des ressources halieutiques.
Tout a commencé avec la conférence organisée à Nouakchott en 2015 sous la houlette de Peter Heigen, le père fondateur de l’initiative. Un schéma de participation au suivi de gestion à l’image de l’ITIE qu’il avait quitté. Il n’y eut d’ailleurs pas beaucoup de mal à convaincre les autorités de l’époque à prendre en charge le démarrage de l’initiative. Près d’un milliard d’ouguiyas sera dépensé par les autorités mauritaniennes pour la mise sur les rails de la FiTi. Entretemps la Mauritanie a perdu le siège d’établissement de l’organisation sapé par Les Seychelles où est désormais installé le secrétariat international, sans doute aussi plus « attractif ».
Dans la réalité, c’est l’ancrage institutionnel auprès du ministère des finances et l’instabilité au poste de président du GNM, dévoué au directeur des investissements, qui a quelque peu contribué au retard des activités du GNM. En effet, trois présidents avec des réussites diverses se sont alternés aux commandes du GNM dont la véritable cheville ouvrière était sans aucun doute le secrétariat logé au ministère des pêches et dont s’acquittait parfaitement, Lamine Camara, directeur de la Dare et secrétaire national du GNM. Une telle situation est d’ailleurs à l’origine de la relocalisation imminente et définitive du GNM au ministère des pêches et de l’économie maritime.
Tous ces désidératas doublés par la survenance de pandémie de la Covid-19 ont sans doute impacté la mise en place puis l’activité du GNM. Mais tous les tracas ne sont plus que de l’histoire ancienne avec la publication du rapport 2018 qui devrait être suivi par trois autres rapports (2019 et 2020 groupés) et enfin le rapport 2021. L’acceptation desdits rapports par la FiTi pourrait aboutir à la déclaration de conformité recherchée comme un label. Un aspect souligné en filigranes par le ministre Ould Dahi : « La transparence, qui occupe une place prépondérante dans le secteur des pêches et de l’économie maritime, constitue un élément indispensable dans l’administration et la gestion durable de ce secteur pour lequel elle contribue à renforcer la confiance des investisseurs qu’elle attire sans cesse ».
Premier rapport, une première
Les Seychelles sont le premier pays à avoir rendu public un rapport sur la transparence de gestion des ressources halieutiques dans leur pays. La présence sur leur territoire du secrétariat international y sans doute pour quelque chose. Mais, sans narcissisme aucun, il serait injuste de comparer l’ampleur du travail accompli dans les deux pays. Le rapport publié de haute facture par le GNM en Mauritanie, grâce à l’appui d’expertise produit par le PRCM, porte sur un secteur plus important quantitativement au moins en Mauritanie. L’objectif assigné par la production d’informations crédibles, accessibles et complètes est certainement le même. Mais l’ampleur et le rendement socioéconomique n’est pas le même pour les deux pays.
Rien que pour indice, le rapport du Seychelles porte sur un potentiel de 50 navires alors qu’en Mauritanie, on en compte 452. Le rapport du GNM renseigne sur des informations cruciales pour la bonne gouvernance du secteur (accords internationaux, réglementation, l’accès à la ressource et sa répartition entre les différentes industries) mais aussi les défis et zones d’ombre de l’activité (transparence dans la gestion des quotas ou encore rejets de poissons).
Pour ce faire, le premier rapport du GNM vise à faciliter la situation complexe du secteur des pêches en Mauritanie, évalue les réponses aux 6 exigences standard FiTi et enfin fournit des recommandations pour améliorer davantage la transparence du secteur. Toutes les données collectées sur le secteur ont été mises en ligne sur un site spécialement dédié à cette cause (www.fiti-mauritanie.mr).
Avec ce premier rapport, une étape est sans doute franchie. On en sait plus sur le nombre des navires de pêche industrielle (nationaux ou étrangers) ou artisanale, sur les débarquements, sur l’effort de pêche, l’emploi ou encore sur les recettes générées au trésor public et la valeur ajoutée…Des données utiles pour éclairer tous les acteurs sur une gestion durable et écologiques des stocks pour les différents usages. Mais cela n’est évidemment pas suffisant eut égard aux attentes des normes de conformité que la FiTi attend des trois prochains rapports pour obtenir le label de conformité. Il va donc falloir encore cravacher dur pour publier un registre en ligne de tous les navires de pêche de grande échelle battant pavillon mauritanien ou étranger et sur les licences de la pêche à petite échelle. Ajoutons-y l’exigence de publication d’informations annuelles sur les paiements effectués par les navires, sur les captures en ZEE, sur les transbordements et les débarquements et sur les rejets dans les deux sous-secteurs pour comprendre que malgré le pas de géant franchi avec la publication du premier rapport, une date butoir 2022, probablement au mois de mars, décidera ou non de cette conformité visée. Mais d’ici là ; il faudrait rendre courant 2021, les rapports 2019 et 2020. Le GNM n'est pas au bout de ses peines!
Jedna DEIDA