Port autonome de Nouakchott : la vaccination comme écran de fumée d’une gestion calamiteuse | Mauriweb

Port autonome de Nouakchott : la vaccination comme écran de fumée d’une gestion calamiteuse

mar, 26/08/2025 - 11:51

Ce lundi matin, le Port autonome de Nouakchott a lancé en grande pompe une campagne de dépistage et de vaccination contre l’hépatite virale, à l’occasion de la journée mondiale consacrée à cette maladie. Derrière les sourires officiels, les photos bien cadrées et les discours convenus, se cache pourtant une autre réalité : celle d’une infrastructure stratégique mal gérée, gangrenée par les lenteurs, les surcoûts, et un mépris persistant pour les conditions de travail des dockers.

Une opération sanitaire instrumentalisée

La vaccination est évidemment une initiative louable. Personne ne contestera l’importance de protéger les travailleurs portuaires contre une maladie silencieuse mais grave. Mais à quel moment le port a-t-il réellement pris soin de sa main-d’œuvre ? Ces mêmes dockers, aujourd’hui invités devant les caméras pour tendre le bras à une seringue, sont les premiers à se plaindre de conditions de travail précaires : absence d’assurance maladie, équipements de protection inexistants, salaires irréguliers, accidents passés sous silence.

Dès lors, cette campagne n’apparaît pas comme un véritable tournant social, mais comme une opération de communication. Une manière habile de vernir l’image d’un établissement régulièrement pointé du doigt pour ses dérives, et de détourner l’attention des échecs criants dans la gestion quotidienne du port.

Le vrai mal du port : la gouvernance

Au-delà de l’épisode sanitaire, le Port de Nouakchott souffre d’un mal bien plus profond : la mauvaise gouvernance. Ce qui devrait être un poumon économique vital pour la Mauritanie est devenu un symbole de gaspillage et d’inefficacité.

  • Infrastructures obsolètes : les quais saturés, les retards d’accostage, les ruptures de services restent le lot quotidien.
  • Coûts exorbitants : les opérateurs économiques dénoncent régulièrement des frais portuaires parmi les plus élevés de la sous-région, grevant la compétitivité nationale.
  • Corruption et clientélisme : recrutements opaques, marchés attribués sans transparence, et pratiques douteuses qui alimentent un cercle vicieux d’inefficacité.
  • Impact sur le consommateur : chaque retard et chaque surcoût au port se répercute directement sur les prix dans les marchés, aggravant la cherté de la vie pour les ménages mauritaniens.

Quand la santé masque l’échec économique

Présenter une campagne de vaccination comme « contribution à la politique sanitaire nationale » ne peut masquer une évidence : le port peine à remplir sa mission essentielle, celle d’assurer la fluidité des échanges commerciaux et de soutenir l’économie nationale. Alors que la Mauritanie dépend à plus de 70 % de ses importations alimentaires, la moindre congestion au port entraîne une flambée immédiate des prix du riz, du sucre, de l’huile ou du ciment.

Il est donc légitime de dénoncer ce double langage : d’un côté, on vaccine quelques centaines de dockers sous les caméras ; de l’autre, on laisse pourrir une situation structurelle qui pénalise toute la nation.

La santé des travailleurs est précieuse, mais elle ne doit pas servir de paravent à une gouvernance défaillante. Tant que le Port autonome de Nouakchott continuera d’être géré comme une caisse opaque et une scène de communication politique, aucune seringue, si utile soit-elle, ne pourra guérir ses véritables maladies : la corruption, l’inefficacité et le mépris du bien public.