
Chaque année, des centaines de millions de tonnes de poussière sont arrachées aux paysages arides d'Afrique du Nord par le vent, formant d'immenses panaches qui traversent l'océan Atlantique. La région saharienne est ainsi reconnue comme la plus grande source de poussière atmosphérique au monde, représentant environ la moitié des particules en suspension à l'échelle planétaire.
Le satellite Aqua de l’Observatoire de la Terre de la NASA, équipé du capteur MODIS (Moderate Resolution Imaging Spectroradiometer), a immortalisé ce phénomène le 25 février 2025 en capturant une image saisissante d’un nuage de poussière s’échappant de la côte mauritanienne. Si des panaches bien plus imposants ont déjà été observés dans cette zone, celui-ci se distingue par la particularité de ses teintes, révélant une origine inhabituelle.
L’analyse des images satellite indique que la source principale de cette poussière claire est la Sebkhet Te-n-Dghâmcha, également appelée Sebkha de Ndrhamcha, un lac saisonnier et une dépression salée située au nord-est de Nouakchott. Lorsque l’eau du lac s’évapore, elle laisse derrière elle d’importantes quantités de gypse, un minéral blanc. D’autres composants tels que la calcite et la kaolinite, riches dans ce bassin, contribuent également à la clarté du panache. En contraste, les traînées de poussière plus sombres et jaunâtres repérées dans l’image sont probablement chargées en hématite ou en goethite, des oxydes de fer qui donnent aux particules des nuances rougeâtres ou ocre.
Les lacs asséchés et les lits de rivières constituent des sources majeures de poussière atmosphérique. L’évaporation de l’eau y dépose des particules fines et légères, facilement soulevées par le vent en l’absence de couverture végétale. Une fois en suspension, ces poussières sahariennes peuvent avoir un impact significatif sur la santé humaine en transportant des agents pathogènes et en aggravant les problèmes respiratoires, aussi bien à proximité qu’à des milliers de kilomètres. Par ailleurs, elles jouent un rôle essentiel dans l’équilibre écologique mondial, en nourrissant les phytoplanctons océaniques, en fertilisant les sols de l’Amazonie et en influençant la formation des ouragans.
Selon l’atmosphéricien Holger Baars, du Leibniz Institute for Tropospheric Research, cette tempête de poussière spécifique s’est distinguée par sa faible altitude. Les panaches de poussière qui traversent l’archipel du Cap-Vert se situent habituellement entre 4 et 5 kilomètres au-dessus du niveau de la mer. Celui observé au large de la Mauritanie n’a toutefois atteint que 1,5 kilomètre d’altitude, un niveau suffisamment bas pour impacter directement la qualité de l’air dans la région.
Ce nouvel épisode illustre une fois de plus le rôle prépondérant du Sahara et des zones désertiques mauritaniennes dans la dynamique des aérosols planétaires, tout en soulignant les risques sanitaires et environnementaux posés par ces phénomènes naturels.