RFI Afrique - En Mauritanie, l’ancien président Mohamed Ould Abdel Aziz a été placé en détention préventive par un juge du pôle de lutte anticorruption du parquet de Nouakchott-Ouest le 22 juin dernier.
Celui qui a dirigé la Mauritanie entre 2008 et 2019, a été inculpé le 12 mars dernier pour corruption, détournement de biens publics et blanchiment d’argent. Des faits qu’il a toujours niés.
Le fondement et les conditions de cette détention préventive ont été dénoncées mardi soir par ses avocats à l'occasion d'une déclaration à la presse.
« Un arrêté portant affectation d’une partie de l’école de police à la détention de l’ancien président a été créé quelques heures avant son audition et a débouché sur sa mise sous mandat de dépôt, ce qui prouve que la décision de sa détention avait été prise bien avant sa comparution devant le juge ayant ordonné sa détention en préventive, estime maître Taleb Khyiar, membre du collectif d’avocats qui défend l’ex-chef de l’État. Cet arrêté demeure sans effet aussi longtemps qu’il n’aura pas été publié au Journal officiel. Cette condition n’étant pas remplie, il s’en suit que le lieu de détention de l’ancien président est illégal. Notre client est retenu en isolement total, privé de toute visite des membres de sa famille, de toute activité sportive et de tout accès à un espace ensoleillé. Notre client est victime de manières ségrégationnistes, de violations permanentes de ses droits fondamentaux, violations que nous nous sommes toujours attelés à dénoncer dans le respect des textes en vigueur, ou pour charger l’instruction en espérant voir la magistrature s’émanciper de la mainmise des services de sécurité et du pouvoir exécutif, pour que dans cette affaire, la justice retrouve sa sérénité et prenne le pas sur la vengeance. »
Si les avocats de Mohamed Ould Abdel Aziz affirment que cette affaire relève du règlement de compte politique et s'indignent de sa détention, pour maître Brahim Ebety, le coordinateur du collectif des avocats de l'État mauritanien, cette mesure est normale et la loi est très claire.
« Il s’agit d’une question que le pôle d’instruction a réglée, parce qu’il estime que l’ancien président a failli aux obligations mises à sa charge, c’est-à-dire se conformer au contrôle judiciaire. Il est devenu un justiciable mauritanien comme tout autre ! C’est la première fois qu’un président de la République est poursuivi pour des faits aussi graves, il s’agit de malversation financière, le monde africain et le monde arabe a besoin d’un exemple pareil. En matière de corruption, toutes les procédures se déroulent collégialement, même le parquet est constitué d’un pôle, de trois procureurs, et l’instruction est constituée de trois juges qui veilleront à la transparence. Nous aussi, au niveau du collectif des avocats de Mauritanie, nous veillerons à ce qu’il y ait le maximum de transparence et qu’il y ait un procès le plus équitable, qui fera d’ailleurs histoire dans notre sous-région africaine et arabe », prévient Brahim Ebety.