La particularité de la présidentielle de 2019 prévue en juin en Mauritanie est d’une part, la participation de l’opposition au scrutin, même si c’est en ordre dispersé, d’autre part, la dissolution d’un nombre important de partis politiques dont certains avaient capitalisé au moins des expériences électorales quoiqu’avec des performances timides.
Le tableau d’affichage sera de loin mieux fourni que la dernière élection présidentielle ayant consacré la victoire du président sortant qui n’avait comme challenger de taille que le leader du mouvement IRA Birame Dah Ould Abeid arrivé avec brio en deuxième position.
Sur la ligne de départ d’une présidentielle très proche, deux hommes font le plus parler d’eux par leur tempérament différent mais aussi par leur positionnement sur l’échiquier politique.
Il s’agit du candidat Biram Dah Abeid qui se présente sous les couleurs du parti Sawab et du Ministre de la défense démissionnaire, le général Ghazouani soutenu par la majorité présidentielle. Un troisième homme, Sidi Mohamed Ould Boubacar fait pour la première fois son entrée dans la course à la magistrature suprême.
Ce dispositif sera complété largement par une kyrielle de partis issus d’une opposition divisée et n’ayant comme cartes que le départ en solo de ses leaders ou l’alignement derrière l’un des candidats déclarés. L’une ou l’autre des options fait plus l’affaire du cheval de la majorité qui continue de recevoir une plèbe de « souteneurs».
Mais rien n’est d’avance gagné pour ce dauphin du président sortant dont l’inexpérience politique va croiser le fer avec des gros calibres résolus à tenir tète face à la machine de guerre du mentor du locataire du palais gris. Il est difficile dans ces conditions d’assurer une victoire dès le premier tour à l’image du coup KO de Macky Sall que l’opposition sénégalaise n’arrive pas à dégréer. Les vieux lions de l’opposition mauritanienne sont en perte de vitesse mais ils ne veulent pas abandonner un combat pour lequel ils se sont investis corps et biens. Ceux qui ont encore la flamme héroïque dégaineront leurs dernières cartouches avant de tirer leur révérence.
Dans une jungle politique où la gloire n’est pas offerte en chrysanthème aux grands leaders. D’autant plus que la ligne de conduite morale de nos dirigeants est plus orientée vers l’accaparement des deniers publics qu’aux valeurs éthiques et citoyennes. Dans un pays les symboles liés à la mémoire nationale sont haïssables et voués au mépris par le système au pouvoir. Les sorties intempestives du président sortant à l’endroit des vieux barons de l’opposition leur sonnent encore dans les oreilles.
En lice ou non, les dinosaures de la vieille garde contestatrice savent que le terrain politique est déjà sous le maillage d’un système qui dispose des ressources de l’Etat, de son administration électorale pour verrouiller le scrutin en amont et en aval. Les concessions sur la révision du fichier électorale, ou l’ouverture de la ceni aux membres de l’opposition ne change rien au cours des événements.
G, comme Ghazouani
Le regard d’apparence lointain de cet homme de taille modeste et au crane chauve dissimule un trait de caractère qui va se révéler dans quelques semaines au grand jour aux mauritaniens. Après son baptême du feu, suivi deux semaines plus tard de sa démission, le candidat du pouvoir se prépare à harnacher sa monture pour se jeter dans la bataille. Ses ouailles affluent dans tous les sens pour faire allégeance y compris dans les rangs d’une certaine opposition aux calculs légers. Droit dans les bottes, le graal de la majorité n’aura que l’embarras du choix pour composer son directoire de campagne tant la queue des laudateurs est longue. Reste à savoir comment il va sortir la tête de l’eau lui qui est sous forte emprise de son « géniteur » politique. En bon « Deyboussaty » les ruses ne lui feront pas défaut !
B, comme Biram
Le nouveau député, leader charismatique du mouvement abolitionniste IRA, s’est déclaré avant tout le monde candidat à la présidentielle. Bardé de distinctions internationales pour le combat contre l’esclavage et le racisme, pourfendeur du système en place, Birame Dah Abdeid ne manque pas de verbe, pour galvaniser les masses populaires et les nombreuses victimes de toutes sortes. Cette foudre de guerre dont les sorties font trembler le système conservateur est adulé par son franc –parler dans les milieux populeux et dans les cercles des opprimés où il pourrait puiser de nombreuses voix. Il sera comme la dernière présidentielle l’une des vedettes de la campagne présidentielle avec le secret espoir que la chance lui sourira.
S, comme Sidi
Ould Boubacar, c’est le troisième homme du peleton de départ de la course. Ancien premier ministre et diplomate, cette personnalité n’est que peu connue sur la scène politique. Même dans l’exercice de ses fonctions, Sidi Mohamed Ould Boubacar a toujours cultivé la discrétion et la modestie. En l’absence d’un consensus au sein de l’opposition autour d’un candidat unique, le pôle politique qui soutenait sa candidature lui accorderait son quitus électoral. Ould Boubacar dispose-t-il d’un secret dont il est le seul à connaitre pour créer la surprise ? Wait and see ?
CTD (Le Rénovateur Quotidien)