En s’abstenant de proposer un candidat à sa succession à huit mois de la fin de son second mandat, le président Ould Abdel Aziz n’ajoute-t-il pas exprès de la confusion à la confusion née du marasme politique que vit le pays ?
Certainement… mais l’homme est-il réellement maître du jeu ? Tout porte à croire que le président Ould Abdel Aziz n’a pas encore dévoilé tous ses secrets sur la fin de son mandat prévue pour la mi-2019. Même si lors de ses dernières sorties publiques, il n’a cessé de réitérer son engagement à respecter la constitution -qui limite les mandats présidentiels à deux-, décidant incidemment de ne pas se représenter pour un troisième mandat, le chef de l’Etat ne semble pas serein.
Pas à cause des partis de l’opposition -affaiblis- qu’il méprise. Encore moins à cause des engagements de départ du Pouvoir qu’il peut regretter. En fait, tout se passe comme si une force supérieure, l’étouffe et le contraint à continuer d’observer la situation.
Sinon, pourquoi ne désignerait-il pas un candidat à sa succession dès lors où quelques mois nous séparent de la prochaine présidentielle ? Pourquoi continue-t-il de tolérer les sorties du ministre porte-parole du gouvernement pour qui, il resterait encore au pouvoir au-delà de son second mandat ? Pourquoi encourage-t-il les partisans du troisième mandat dont la campagne a connu dernièrement un regain d’activité dans l’ensemble du territoire national ? Pourquoi laisse-t-il son clan familial cultiver et encourager des informations sur la continuation de son règne au-delà de 2019 ?
Après le départ de Ely Ould Mohamed Vall et l’affaiblissement de l’opposition, s’il existe aujourd’hui un obstacle, voire un frein aux projets-« desseins » du président de la République, ce ne peut être que de l’état-major des forces armées nationales que dirige son compagnon de route le général Ould Ghazouany.
On se rappelle qu’en prenant à deux le pouvoir des mains de Ould Taya en 2005, les deux hommes s’étaient juré fidélité et solidarité. Depuis, ce contrat a vaincu de toutes les épreuves. Des chefs de tribus, des élus, des membres du gouvernement, des militaires et même des puissances étrangères ont tenté de brouiller ces relations, en vain.
Tous en ont fait les frais à l’image du colonel à la retraite, maire de Zoueratt, Cheikh Ould Baya, un moment pressenti comme probable successeur du Raïss et qui, fort de ce statut, avait poussé sa témérité jusqu’à décider d’organiser des journées de réflexion politique sur l’avenir du pays, avec le parrainage du président de la République et insidieusement, au nez et à la barbe du général Ould Ghazouany qu’il considérait comme un adversaire.
Non seulement, cette manifestation n’a finalement pas été autorisée après qu’elle eut pourtant bénéficié d’une imposante campagne d’annonce à la TVM, mais plus, Cheikh Ould Baya est depuis, réduit au silence. Et, pour étouffer toute velléité présidentielle, il a été promu la semaine dernière, candidat UPR à la députation de Zoueratt.
Au demeurant, le terrain ne serait pas entièrement balisé entre le président et le général. Autant, ils étaient engagés à se partager la gestion du pays -l’un s’occupant de la politique et du secteur public et l’autre des forces armées nationales-, autant ils s’entendaient à se relayer au pouvoir en conservant celui-ci pour leur intérêt commun, autant aujourd’hui, ils se craignent. Sont finalement passés par là, les lobbies de tous bords, les nouveaux intérêts économiques, financiers, les proches du président de la République, ceux du général et surtout les notabilités tribales, les deux hommes appartenant à deux tribus historiquement antagonistes.
Départ
Au mois d’octobre prochain, le général Ould Ghagouany va faire valoir ses droits à la retraite. Conséquemment, il perdrait sa force militaire, son pouvoir et son influence dans le pays. Va-t-il se laisser « éliminer » sans garantie? Successeur naturel du président de la République, il ne peut être désigné candidat à la succession alors qu’il porte encore le treillis ! Devra-t-il user dès à présent, de sa puissance pour être promu à cet avenir promoteur auquel il s’attend ?
Pour autant, bénéficiera-t-il en aval, des égards du président de la République auprès duquel il n’aurait plus, à ce moment, aucune influence ?
Ce qui est sûr, c’est que le président de la République ne se prononcera pas clairement et définitivement à propos de sa succession et du troisième mandat, avant ce fatidique mois d’octobre. Le ministre porte-parole du gouvernement en a d’ailleurs fait écho jeudi dernier lorsqu’il a soutenu : "ceux qui disent que le président de la République va partir après 10, 11 mois sont vraiment en train de rêver en plein jour. Les événements et jours à venir (octobre 2018-vont vous démontrer ce que je dis".
Le sort du Pouvoir ou plutôt, le sort de la Mauritanie est-il lié à ce mois d’octobre à venir ? Libre à chacun d’apprécier, pour notre rédaction, il n’existe pas l’ombre d’un doute.
JOB
L'Authentique