Madame, le 5 Mai dernier, six membres du Congrès des USA (1) tenaient à vous exprimer, publiquement, leur « préoccupation face à l'approbation récente, par le FMI, d'un crédit de 163,9 millions de dollars accordé à la République Islamique de Mauritanie ».
Et de citer diverses sources motivant leur inquiétude : le rapport, publié en 2017 par SHERPA, déclarant que «la Mauritanie est, actuellement, l'un des pays les plus corrompus au monde » ; Transparency International, la classant 142ème sur 176 sur l’échelle de la bonne gouvernance ;
la CIA et le Département d’État s’inquiétant, eux, du « manque fondamental d'engagement, accompagné d’efforts sérieux et soutenus, pour combattre l'esclavage héréditaire»… Tous ces rapports ont en commun une écriture non-mauritanienne. Ce n’est évidemment pas que les Mauritaniens ne les fassent leurs.
Moins de cinq ans après le coup de force du général Ould Abdel Aziz (Août 2008), contre le premier président mauritanien démocratiquement élu, la dérive du pouvoir était devenue si patente qu’un de ses soutiens de la première heure, le RFD d’Ahmed Ould Daddah –déjà très échaudé, il est vrai, par le massacre des accords de Dakar (2009) – se devait d’en dresser l’accablant constat (2).
De nombreuses autres enquêtes l’ont, depuis, considérablement étoffé, comme celle menée, en Novembre 2013, par l’Observatoire des biens et avoirs mal acquis (3), ou, encore, des diverses organisations de la Société civile mauritanienne engagées dans la défense des droits humains (4).
En Mars 2016, j’ai moi-même tenu à signaler, publiquement, à celle qui gérait le portefeuille Mauritanie au FMI, madame Mercedes Vera Martin, l’aggravation manifeste de la situation (5). Toutes ces voix et bien d’autres encore – en fait, tout celui qui osait mettre en cause la gestion du pouvoir actuel – se sont vues, l’an dernier, taxées, par celui-ci acharné à totalement renverser le vrai, d’odieux et corrompus « conspirateurs contre la Nation ».
Une falsification qui prend, à l’aube de consultations locales et nationales cruciales, pour la Mauritanie, une tournure plus qu’inquiétante. La présomption de fraudes et manipulations massives augmente de jour en jour.
Le FMI aurait-il décidé de les financer ? 23,4 millions de dollars du crédit susdit seraient, en effet, « immédiatement disponibles », nous informent les lucides membres du Congrès américain.
Il en a fallu beaucoup moins, en Août 2017 - avec, il est vrai, la mobilisation massive de tout l'appareil de l'Etat, des media publics et des entreprises parapubliques - pour acheter juste assez d’acquiescements populaires à de bien peu goûteux amendements constitutionnels.
Votre regrettable contribution au « bon » déroulement des élections à venir devraient donc largement suffire. À moins que vous ayez la sagesse d’attendre leurs résultats, pour venir en aide à une Mauritanie qui en a certes bien besoin, après dix années d’un si rude régime…
Ahmed Ould Cheikh
Notes
(1) :Thomas A. Garret, Jr. Mark Meadows, Gus Bilirakis, Scott Perry, Jeff Duncan et Lee Zeldin. Voir http://lecalame.info/?q=node/7542
(2) : http://www.cridem.org/imprimable.php?article=640740 (Cheikh Aïdara, « L’Authentique »)
(3) :http://biensetavoirsmalacquis.blogspot.com/2013/11/v-behaviorurldefaultv...
(4) : Voir, par exemple, http://mauriweb.info/node/1445
Le Calame