La police mauritanienne a violemment dispersé une marche organisée mercredi après-midi, et en début de soirée, dans les communes de Sebkha (banlieue sud-ouest) et Arafat (banlieue est) de Nouakchott, par la Coordination de l’opposition démocratique (COD), une nouvelle alliance mise sur pied début juillet, qui prône un boycott actif du référendum constitutionnel du 5 août prochain.
Plusieurs leaders du collectif, parmi lesquels notamment le sénateur frondeur Mohamed Ould Ghadda, ont été blessés après ces graves incidents. Pourquoi une intervention musclée de la police pour stopper une manifestation en pleine campagne? «Celle-ci n’était pas autorisée», souffle une source bien informée auprès de l’administration.
Quelle serait alors la signification du caractère spécifique de la période réservée à la campagne référendaire? Là également, la réponse est claire: les seuls camps autorisés à faire campagne sont ceux du «Oui» et du «Non».
Celui du boycott, c’est-à-dire l’opposition ayant snobé le dialogue du 29 septembre au 20 octobre 2016, qui représente la quasi-totalité de cette mouvance, n’est pas autorisé à battre campagne.
Une option qui explique également son absence dans la grille des programmes des médias d’Etat pendant cette période.
Réagissant à ces événements, le président du Mouvement pour un changement démocratique (MCD) dénonce «le durcissement d’un régime qui utilise l’administration et les finances publiques pour faire sa campagne. Nous assistons à un tournant autoritaire dans la gestion du régime de Mohamed Ould Abdel Aziz.
Les rares pouvoirs militaires encore existants ne font plus recours à ce genre de pratiques. Il s’agit clairement d’un bâillonnement des libertés. On file tout droit vers le joug d’un régime autocratique et dictatorial jamais observé dans le pays».
Propos identiques chez Isselmou Ould Mohamed Abass, responsable au sein du Forum national pour la démocratie et l’unité (FNDU), qui note que «les médias officiels, la radio et surtout la télévision, sont entièrement voués à la propagande gouvernementale en faveur du ”Oui”». Même certains médias privés sont appelés à la rescousse avec comme slogan «les amendements constitutionnels sont un choix du peuple».
Il ne sera même pas dit, qu’après avoir tenu ce référendum en violation flagrante de la constitution (l’article 99 est sans équivoque), confié l’organisation à une Commission électorale nationale indépendante (CENI) dont le mandat a expiré, et mobilisé tous les moyens humains et matériels de l’Etat pour le gagner, le pouvoir a laissé ce scrutin se dérouler sous des formes peu démocratiques, en ne permettant pas que s’expriment, du moins pendant la campagne, les voix contraires à ses vues.
Qui alors croira aux résultats d’une consultation populaire à travers laquelle le peuple n’avait qu’un seul choix à faire, celui du gouvernement.
C’est dire que l’enjeu du scrutin sera simplement le crédit à lui accorder, en dehors des scores du «Oui», du «Non» et du taux de participation, éléments qu’il serait toujours possible d’arranger par la vieille méthode du bourrage des urnes, estime le même opposant.
Le camp de l'opposition ayant appelé au boycott prévoit plusieurs manifestations et une journée «pays mort» le jour du scrutin du 5 août. Toutefois, les autorités ont interdit toutes les manifestations de cette opposition.
Par notre correspondant à Nouakchott Cheikh Sidya