
Alors qu’Aura Energy Limited vante les avancées de son projet d’exploitation de l’uranium à Tiris, en Mauritanie, plusieurs zones d’ombre demeurent autour de cette entreprise qui se présente comme un moteur du « futur énergétique propre ». Derrière les promesses de retombées économiques et d’un développement « durable », le projet suscite des inquiétudes majeures sur son impact environnemental, sa viabilité financière et son acceptabilité locale.
Un projet minier en quête de financements
Aura Energy affiche son optimisme en annonçant des « progrès significatifs » vers la production d’uranium à Tiris. Pourtant, la question du financement reste en suspens. La société reconnaît que les discussions avec des investisseurs et des banques sont toujours en cours, sans qu’aucune garantie tangible ne soit apportée. Malgré la mise en avant d’un partenariat avec une banque de développement occidentale, aucune annonce concrète sur la finalisation des fonds n’a été faite. Une incertitude qui interroge sur la réelle capacité d’Aura Energy à mener à bien ce projet ambitieux.
Une gestion de l’eau problématique
La question de l’accès à l’eau est centrale pour un projet minier de cette envergure. Aura Energy affirme avoir confirmé l’existence de ressources hydriques suffisantes grâce à des études hydrogéologiques. Or, ces ressources proviennent du bassin de Touadeni et du champ de forage C22, deux zones où la surexploitation pourrait rapidement entraîner des tensions sur les réserves locales. Le risque de concurrence avec les besoins des populations locales et de l’élevage, déjà sous pression dans cette région aride, est à prendre en compte. En l’absence de garanties sur la gestion durable de cette ressource, ces annonces laissent planer le spectre d’une dégradation environnementale majeure.
Un développement sous contrôle étranger
Si Aura Energy met en avant le recrutement d’un responsable mauritanien, Mohamed Sid’Ahmed, comme directeur des opérations, le projet reste largement contrôlé par des intérêts étrangers. Les décisions stratégiques, qu’il s’agisse du financement, des normes environnementales ou des choix techniques, sont prises en Australie et au Royaume-Uni. Cette dépendance aux investisseurs internationaux pourrait à terme poser un problème de souveraineté économique pour la Mauritanie, qui verrait une ressource stratégique exploitée sous le contrôle de multinationales.
Un cadre réglementaire en question
Aura Energy se félicite du dialogue « constructif » avec le gouvernement mauritanien, notamment sur les licences d’exploitation et les mesures de sécurité pour le transport du minerai. Toutefois, la législation encadrant l’exploitation de l’uranium en Mauritanie reste floue et sujette à des ajustements selon les pressions exercées par les investisseurs étrangers. L’absence de débat public sur l’impact d’une telle industrie, notamment en matière de gestion des déchets radioactifs, soulève des inquiétudes quant à la transparence du processus.
Un pari risqué pour la Mauritanie
Alors que l’uranium est présenté comme un atout stratégique pour l’avenir énergétique, son exploitation demeure un secteur à hauts risques, tant pour l’environnement que pour les populations locales. En l’absence d’un cadre de régulation strict et de garanties financières solides, le projet Tiris pourrait bien devenir un mirage économique plutôt qu’une opportunité réelle pour la Mauritanie.
Alors que l’échéance de production est annoncée pour 2027, la question demeure : la Mauritanie a-t-elle réellement la maîtrise de ce projet, ou n’est-elle qu’un terrain d’expérimentation pour des investisseurs étrangers en quête de profits à court terme ?