Une nouvelle tragédie de l’émigration irrégulière a frappé les eaux des Caraïbes ce dimanche 26 janvier 2024. Une pirogue contenant les corps en décomposition de cinq personnes non identifiées a été découverte près de la plateforme pétrolière Cassia, au large de la côte sud-est de Trinidad. Les garde-côtes de Trinidad et Tobago ont tenté de remorquer l’embarcation vers la terre ferme, mais celle-ci a coulé en mer après la rupture du câble de remorquage, devenant désormais introuvable.
Selon le lieutenant Khadija Lamy, porte-parole des garde-côtes, “les efforts pour sécuriser l’embarcation ont été extrêmement difficiles en raison de son état fragile.” Une ligne de remorquage a été attachée avec succès à 00 h 45, mais à 4 h du matin, la mer agitée au large de Mayaro a provoqué la rupture du câble, et la pirogue a dérivé hors de vue. “Malgré des recherches intensives, nous n’avons pas pu localiser l’embarcation, qui est présumée avoir coulé en raison de son état gravement détérioré”, a-t-elle ajouté.
Cette découverte macabre rappelle un précédent similaire en mai 2021, où une pirogue contenant les corps de 12 migrants africains avait été retrouvée dérivant au large de Tobago. La construction de la pirogue découverte récemment présente de nombreuses similitudes avec celle de 2021, selon Lamy, renforçant l’hypothèse qu’elle provient d’Afrique de l’Ouest, possiblement de Mauritanie. Ces bateaux, initialement conçus pour des activités côtières, ne sont pas adaptés à de longues traversées océaniques, a précisé le ministre de la Sécurité nationale, Fitzgerald Hinds.
En 2021, l’embarcation découverte à Tobago avait quitté Nouadhibou, en Mauritanie, le 13 janvier, avec pour destination les îles Canaries. Cependant, des défaillances mécaniques et les courants marins avaient poussé le bateau bien au-delà de sa route prévue, jusqu’aux Caraïbes. Les 12 passagers avaient tous péri, probablement de déshydratation et d’hypothermie, selon une autopsie réalisée en 2023. L’identité de l’un des passagers, Alassane Sow, un Malien, avait été confirmée grâce à une enquête internationale impliquant la Croix-Rouge et des journalistes de l’Associated Press.
Mayemouna Sow, tante d’Alassane, a exprimé sa tristesse face à cette nouvelle découverte : “Cela me rappelle douloureusement la perte de mon neveu. Ces disparitions constantes sont une tragédie pour nos familles. Nous essayons d’aller de l’avant, mais entendre ces histoires revient toujours rouvrir des blessures.” Elle a également évoqué la disparition de son cousin Demba Anne, parti lui aussi dans une pirogue similaire et dont la famille est toujours sans nouvelles.
Les garde-côtes de Trinidad ont exhorté toute personne disposant d’informations ou ayant aperçu des débris de l’embarcation à contacter leur quartier général.
Ces drames, bien que récurrents, soulignent l’ampleur et la gravité du phénomène migratoire irrégulier. Si les îles Canaries représentent souvent le premier objectif des migrants, les pirogues qui ratent cette étape critique, comme l’île de Hierro, sont emportées dans l’Atlantique sans espoir de retour. Pour ces passagers en quête d’un avenir meilleur, la mort devient bien souvent la conclusion tragique de leur voyage.
Cette nouvelle tragédie, une de plus dans l’interminable série des naufrages liés à l’émigration irrégulière, interpelle sur l’urgence de solutions globales pour s’attaquer aux causes profondes de ces départs désespérés. En attendant, les familles endeuillées continuent de porter le poids d’une douleur incommensurable, alimentée par l’espoir vain de retrouvailles et la réalité implacable des disparitions.