Le Calame - Le rapport 2020 sur les droits de l’Homme du département d’État américain peint un tableau sombre des prisons mauritaniennes : « […] cachots hideux où la surpopulation a perduré ». Pire, « les conditions sont délétères en raison du manque de nourriture, de la violence, des installations sanitaires inadéquates, du manque de soins médicaux et de détentions provisoires indéfinies ».
Cité dans le rapport, le Comité des Nations Unies contre la torture déclarait, en 2018, que « les autorités mauritaniennes détenaient 2 321 détenus dans des centres conçus pour 2 280 personnes. Les pouvoirs publics incarcéraient des personnes en détention provisoire avec des condamnés représentant un danger pour autrui.
Des gardes masculins surveillaient fréquemment les femmes détenues, une pratique critiquée par la CNDH. Comme sur l’ensemble du domaine carcéral mauritanien sans distinction de genre, le contrôle des deux prisons réservées aux femmes, l’une à Nouakchott, l’autre à Nouadhibou, était principalement assuré par la Garde nationale exclusivement composée d’hommes.
Les quelques femmes surveillantes n’en étaient pas membres mais relevant de la Protection civile (pompiers). Les conditions de détention étaient généralement meilleures pour les femmes que pour les hommes. Selon des responsables de l’administration pénitentiaire, la prison pour femmes de Nouakchott, à Arafat, était moins surpeuplée que celles des hommes […].
[…] Dans l’ensemble du pays », mentionne également le rapport, « les administrations pénitentiaires incarcéraient ensemble des détenus indépendamment de leur peine. Le trafic de drogue était répandu.
Le gouvernement a reconnu que l’insuffisance des contrôles de sécurité imposés aux visiteurs en était la cause. Il est souvent arrivé que des détenus se rebellent et refusent d’obéir aux autorités, dans certains cas pour protester contre la violence et les traitements inhumains infligés par les gardiens ».
La longue litanie ne cesse d’enfler. « De mauvaises conditions de sécurité et la détention dans les mêmes cellules de condamnés variablement dangereux obligent ceux-ci à vivre dans un climat de violence ; certains contraints de soudoyer leurs codétenus pour échapper à la violence ou au harcèlement.
Des prisonniers salafistes se sont plaints de mauvais traitements à la prison civile centrale de Nouakchott. Les ONG locales ont signalé qu’en la prison de Dar Naïm, principal établissement pénitentiaire du pays, des détenus contrôlent partiellement une aile de la prison tandis que les gardiens assurent la sécurité dans l’autre.
Des stupéfiants, des armes et de l’argent liquide circulaient librement parce que les gardiens n’étaient pas en mesure de contrôler efficacement ce qui était introduit dans la prison et ne pouvaient pas pénétrer en toute sécurité dans certaines zones ».
Le rapport 2020 relaie les complaintes des associations de défense des droits de l’Homme. Celles-ci ne cessent de déplorer le manque d’installations sanitaires et médicales adéquates, notamment dans la prison pour hommes de Dar Naïm et dans la prison civile centrale de Nouakchott.
« Le gouvernement a alloué un budget d’environ 50 MRU (1,35 dollar US) par jour et par détenu pour les nourrir et leur procurer des fournitures médicales, un montant insuffisant selon les observateurs. La ventilation, l’éclairage et l’approvisionnement en eau potable étaient, soit insuffisants, soit inexistants, dans de nombreux lieux de détention et cellules […].
[…] En 2018, la direction des Affaires pénales et de l’administration pénitentiaire a ouvert, conjointement avec le ministère de la Justice, un centre de détention pour les jeunes à Nouakchott, qui contenait cinquante-huit mineurs pendant l’année.
La prison ordinaire de Nouadhibou en détenait quant à elle neuf. Une ONG italienne administrait un centre de détention pour mineurs, le seul établissement presque conforme aux normes internationales. À ces prisons pour jeunes s'ajoutent des centres de détention dans les postes de police disséminés dans pays […].
[…] Les autorités autorisaient », continue le rapport, « les détenus à déposer des plaintes pour mauvais traitements auprès de la CNDH et du MNP. La réglementation permettait aussi aux détenus d’élire l’un des leurs pour les représenter auprès de l’administration, ce qu’ils ont fait de temps à autre. […] Le gouvernement a pris connaissance des allégations de conditions inhumaines mais a rarement pris des mesures correctives.
Les prisonniers étaient régulièrement transférés dans des prisons à l'intérieur du pays pour alléger le nombre des prisonniers détenus à Nouakchott, ce qui signifiait souvent que ces prisonniers étaient séparés de leur famille et de leur avocat, augmentant en conséquence la durée moyenne de leur détention provisoire ».
Évoquant les améliorations, le rapport relate le travail entrepris par certains partenaires locaux et internationaux, notamment le CICR, la Fondation Noura et Caritas-Mauritanie. « Ces organisations ont contribué à améliorer l'hygiène générale et les conditions de vie dans les centres de détention et les prisons avec l'aval du gouvernement.
Le CICR a en particulier contribué à l’amélioration de l’infrastructure de l’hygiène et des conditions sanitaires dans les centres de détention et a réhabilité le réseau sanitaire de la prison de Dar Naïm.
Il a également mis en œuvre un programme de lutte contre la malnutrition dans les prisons d’Aleg et de Dar Naïm, en remettant en état de marche les installations de cuisine et en apportant périodiquement des médicaments et autres produits d'hygiène ».