L'Authentique - Le jugement de l’ex-président de la République a été acté. La justice a enfin décidé de franchir le pas en organisant à partir de cette semaine les premières audiences qui devraient conduire à sceller le sort de Ould Abdel Aziz ainsi que 12 de ses anciens collaborateurs ou proches, tous accusés de détournement, à grande échelle, de biens publics, de malversation et de corruption.
La roue de l’affaire dite de la décennie va tourner à partir de cette présente semaine avec les premières sessions du Parquet de Nouakchott.
Dans le box des accusés, 13 accusés, dont deux anciens Premiers ministres et surtout l’ex-président de la République Mohamed Ould Abdel Aziz qui devront tous, répondre des accusations d’enrichissement illicite, de détournements de biens publics, de corruption et de malversations dont ils seraient les auteurs durant les dix dernières années du régime de Ould Abdel Aziz.
Il s’agit pour la Justice, mais aussi pour l’Etat Mauritanie - qui voit son image souffrir sur le pan international du fait du temps que prend cette affaire- de sceller définitivement ce dossier. Depuis l’entame de la semaine dernière, le dossier connaît des procédures intensives : mardi, l’ex-président avait été convoqué.
Ce fut sans ses avocats, qui ont vivement protesté à a situation soulignant qu’ils ont lancé une pétition pour protester contre la manière dont leur client avait été convoqué, soulignant « qu’elle viole l’article 105 du Code de procédure pénale, lequel stipule que « l’avocat qui réside au siège du tribunal d’instruction doit être convoqué au moins quarante-huit (48) heures avant l’interrogatoire », tandis que l’équipe de défense a reçu ladite convocation 24 heures auparavant !
L’interrogatoire du jour qui a vu l’ex-président se présenter seul devant la justice, a de nouveau porté sur la question de détournements de fonds publics et sur le gigantesque patrimoine acquis au terme de sa présidence.
Battant d’un revers de main les questions du juge, Ould Abdel Aziz a, une ième fois, estimé qu’il reste attaché à l’article 93 de la constitution qui l’immunise. Face au mutisme persistant de l’ex Chef de l’Etat, le pôle d’enquête est entré en délibérations pour se prononcer sur la suite à donner à la situation, arrêtant finalement la journée du lundi 26 avril pour le prochain interrogatoire. En fait, le report de l’audition fut retenu, surtout après la réception du tribunal d’une lettre adressée par le collectif de défense de Ould Abdel Aziz, évoquant des irrégularités ayant entaché la convocation. A l’adresse du juge d’instruction, l’ex-président a réitéré sa demande d’autorisation de voyager à l’extérieur du pays « pour répondre à des impératifs d’urgence » a-t-il souligné. En vain !
Jeudi, le parquet s’est repris en mettant à la disposition des avocats de la défense, une copie complète du dossier d’inculpation détenu par le pôle chargé des enquêtes. La veille, cette défense avait protesté contre le refus de ce même pôle qui lui aurait remis un document de 508 pages alors qu’elle considère que celui-ci serait constitué de 5016 pages !
Dans la foulée, le pole chargé des enquêtes et la lutte contre la corruption a délivré une procuration officielle au bureau de gestion des saisies gelées, appartenant à l’ancien président Mohamed Ould Abdel Aziz et à certains membres de sa famille.
Les biens saisis ou gelés ont été divisés en Biens « en nature » : les soldes bancaires qui ont été gelés il y a des mois, dont la plupart appartiennent à la fondation Rahma ou à des membres de la famille, en plus de plusieurs milliards qui ont été confiés à des hommes d’affaires et qui sont placés maintenant dans un compte, au niveau de la caisse de Dépôt et Fonds de développement ; puis sous forme de centaines d’engins, machines et voitures dont les clés ont été remises aux membres du pôle de l’enquête et les serrures des entrepôts qui les abritent remplacées ; et ensuite sous forme immobilière constituée de plusieurs résidences, immeubles et maisons, pour la plupart dans Tevragh Zeina qui devaient tous être confisqués à partir de ce lundi.
Toutes ces propriétés s’inscrivent dans le cadre des 41 milliards d’ouguiyas anciennes que le communiqué du procureur de la république a évoqué il y a quelque temps. Il y a quelques jours, le pôle avait émis une lettre rogatoire judiciaire internationale adressée aux autorités turques pour y retrouver des biens et dépôts de l’ancien président.
De sources dignes de foi, le dossier est désormais aux mains du Tribunal de Nouakchott qui a programmé l’ouverture de la session de justice dans le courant de la semaine.
Selon ces mêmes sources, l’ex-président devrait être entendu aux premières heures de la session et aura fatalement à se confronter à ses 12 autres co-accusés, qui l’ont tous, mis à l’index dans le rapport de la Commission d’enquête parlementaire, l’accusant d’être l’unique responsable de leurs actes.
Nouakchott devrait alors être placée sous haute sécurité avec le risque évident de confrontation sociale. En effet, la situation sociale devrait être en conséquence assez lourde avec d’un côté des manifestants qui vont réclamer la mise en liberté immédiate des accusés et de l’autre, ceux qui vont exiger que justice soit faite et que « les biens spoliés soient restitués ».
Le scénario en perspective a déjà été présenté à l’attention de l’opinion nationale et internationale avec les manifestations organisées par les deux camps la semaine dernière, devant la commission de la Délégation de l’Union européenne pour les premiers et aux portes du Palais de justice pour les seconds.
Faut-il rappeler que l’ex-chef de l’Etat Mohamed Ould Abdel Aziz, qui a été inculpé et placé sous contrôle judiciaire le 13 mars dernier dans une affaire de mal gouvernance et de détournements de fonds publics, parle de tentative de l’empêcher de revenir sur la scène politique. MOM