Les chefs d'État des pays membres de l'Union africaine se réunissent dimanche et lundi à Niamey pour un sommet principalement consacré à la Zone de libre-échange continentale (Zlec).
C’est au Palais des congrès de Niamey, entièrement rénové pour l’occasion, qu’a lieu le sommet des chefs d’État de l’Union africaine (UA), les dimanche 7 et lundi 8 juillet. Pas moins de 31 présidents sont présents. Les premiers ont commencé à arriver vendredi dans la capitale du Niger, où ils ont retrouvé leur ministre des Affaires étrangères.
Les délégations sont logées à l’hôtel Radisson, construit par le Turc Summa et inauguré le 11 juin par Mahamadou Issoufou, ou bien au Gaweye (qui abritera le centre d’accréditation), au Bravia ou dans les villas du Conseil de l’entente.
Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire), Patrice Talon (Bénin), Macky Sall (Sénégal), Alpha Condé (Guinée), Paul Kagame (Rwanda), Faure Gnassingbé (Togo), Félix Tshisekedi (RDC), Abdel Fattah al-Sissi (Égypte), Muhammadu Buhari (Nigeria), Nana Akufo-Addo (Ghana), Denis Sassou Nguesso (Congo-Brazzaville), Idriss Déby Itno (Tchad) sont notamment présents.
Ce sommet est en grande partie consacré à la mise en oeuvre de l’accord portant sur la création de la Zone de libre‑échange continentale (Zlec). Relancé par Alpha Condé, ce vieux projet est l’un des étendards de l’agenda 2063 de l’Union africaine. Il était en discussion depuis 2012 et vise à créer un marché commun de 1,2 milliard d’habitants, dont le PIB cumulé avoisinerait 2 500 milliards de dollars. En janvier 2016, le président du Niger, Mahamadou Issoufou, avait été chargé par ses pairs de mener les travaux de consultation sur ce projet.
Une Zlec finalement avec le Nigeria
L’accord a déjà été ratifié par 25 pays et signé par 53 membres sur les 55 que compte l’organisation. Après des années de refus, le Nigeria de Muhammadu Buhari a finalement annoncé qu’il le ratifierait à Niamey. Le Bénin et l’Érythrée sont désormais les deux seuls pays réfractaires. La ratification du géant nigérian, première économie du continent, avec plus de 190 millions d’habitants (17 % du PIB africain), ne mettra pas fin aux réticences de ses industriels.
« Le Nigeria signe cet accord après de multiples consultations de spécialistes locaux », a ainsi annoncé la présidence, soulignant que la « priorité désormais sera de mener des négociations pour garantir des garde-fous contre la contrebande, le dumping social et autres menaces économiques ».
Pour expliquer sa position, le Nigeria a longtemps expliqué craindre que la Zlec ne soit la porte ouverte à un afflux massif d’importations, venues en particulier d’Asie, d’Europe et de Turquie, via des pays de transit voisins comme le Bénin ou le Cameroun. Lagos redoute également la concurrence d’autres grands pays comme l’Afrique du Sud, le Kenya et le Maroc.
Les négociations entamées depuis le 30 mai, date officielle du lancement de la Zlec, vont donc se poursuivre à Niamey afin de permettre le lancement de la première phase opérationnelle de la zone de libre-échange. Vendredi, les ministres des Affaires étrangères ont choisi Accra, au Ghana, pour abriter le siège du secrétariat général (l’Égypte, Kenya, Ghana, Madagascar et eSwatini (ex-Swaziland) étaient candidats. Les statuts, les cadrages budgétaires et de financement du secrétariat général seront au menu des discussions des chefs d’État et de gouvernements.
Le principe de la Zlec étant d’éliminer d’ici cinq à dix ans les droits de douane sur un ensemble de produits représentant 90 % des lignes tarifaires, les pays membres devront ainsi remettre leur liste de produits dédouanés, dit non-sensibles, et se mettre d’accord sur les règles d’origine, c’est-à-dire les critères permettront de savoir quelle proportion d’intrants africains est nécessaire pour qu’un produit soit considéré comme made in Africa.
Passeport unique et projet de marché unique aérien
La question du passeport unique africain et du projet de marché unique aérien seront abordées. Le traité instituant la Communauté économique africaine sur la libre circulation des personnes, le droit de résidence et le droit d’établissement a été signé par 32 pays, lors du précédent sommet à Kigali, l’an dernier. À l’heure actuelle, il a uniquement été ratifié par le Rwanda.
À noter que la situation au Soudan, en Libye et au Sahel feront également l’objet de discussions. Le médiateur de l’Union africaine (UA), Mohamed El-Hacen Lebatt, a annoncé vendredi que le Conseil militaire et l’Alliance pour la liberté et le changement (ALC), fer de lance de la contestation, s’étaient mis d’accord pour une direction « alternée » de l’instance qui va diriger une période de transition d’environ trois ans.
« Les deux parties se sont mis d’accord sur l’instauration d’un conseil souverain avec une alternance entre les militaires et les civils, pour une période de trois ans ou un peu plus », a-t-il déclaré.
Vendredi à Niamey, la situation libyenne a, elle, été au centre d’une réunion du Conseil paix et sécurité (CPS). Le bombardement d’un camp de migrants, mardi, a été unanimement condamné.
Par Vincent Duhem - envoyé spécial à Niamey (Jeune Afrique via cridem)