Après avoir quitté la Primature, Ould Hademine qui dirigeait l’un des gouvernements les plus décriés de la République sous l’ère Ould Abdel Aziz, a hérité du poste de ministre d’Etat, avec, semble-t-il, un bureau assez exigu, près de la salle des conseils des ministres. Il participera aux réunions hebdomadaires du gouvernement Ould Béchir. Ould Hademine pourrait, comme le supposent certains observateurs, gérer la présidentielle pour le dauphin présumé d’Ould Abdel Aziz, le général Ghazwani. D’autres croient déjà savoir qu’Ould Abdel Aziz aurait plutôt jeté son dévolu sur ledit ancien PM, Ould Hademine. Supputations, supputations…
Même si un ancien officier de l’armée parle de « repli tactique » du Président préparant, en bon officier, la réplique, après des ennuis de sa troupe, Ould Hademine ne serait pas tombé en disgrâce, comme certains voudraient le faire croire. Fidèle et loyal à Ould Abdel Aziz, Hademine n’aurait donc pas dit son dernier mot. Il compterait, dans le puzzle de celui qui l’a sorti de l’ombre de la SNIM, avant de le bombarder ministre de l’Equipement et des transports puis de le consacrer Premier ministre, après avoir réussi à pousser dehors son rival, Moulaye Mohamed Lagdhaf.
La nomination d’Ould Hademine en ministre d’Etat, avec bureau au Palais, et d’Ould Ghazwani en simple ministre de la Défense – troisième dans le rang gouvernemental – Ould Abdel Aziz n’aurait-il décidé de réduire l’influence de son potentiel dauphin tout désigné ? Que nenni, rétorquent certains : le Président Aziz viserait plutôt à protéger son dauphin qu’il ne pouvait laisser « dans la rue », après son départ de l’armée. Une position qui pourrait cependant le fragiliser. Ou, tout aussi bien, l’endurcir : avec un poste au sein du gouvernement, le général à la retraite assiste aux conseils des ministres et s’exerce aux fonctions gouvernementales. Il pourra ainsi recevoir, dans son bureau, toute l’élite politique persuadée que le Président a arrêté son choix sur lui. Cerise sur le gâteau, Ghazwani gardera l’œil sur l’armée et, au-delà, sur le G5 Sahel qu’il a contribué à mettre en place. Ses rapports avec les présidents de ce regroupement s’en raffermiront-ils ? Mais il ne faut pas oublier que le rôle de ministre de la Défense est mineur, comparé à celui de la Grande Muette dont le véritable commandement relève du chef d’état-major et du président de la République. C’est pourquoi le choix du prochain patron des armées est-il très attendu. Mais en revanche, Ould Ghazwani sera lui aussi sous l’œil et la coupe de son ami Président qui garde la main haute sur l’armée et son BASEP.
Selon différentes sources concordantes, le général Ghazwani est considéré comme le « meilleur successeur » d’Ould Abdel Aziz, en 2019, ce qui prouve le peu d’empressement des chancelleries occidentales, européennes surtout, à l’égard de l’opposition politique. L’homme jouirait de grande estime et respect, au sein des corps de l’armée et de la sécurité. Il est discret, comme doit l’être un chef. Il est issu d’un grand ensemble tribal de l’Est du pays. L’homme jouirait également d’une certaine sympathie au sein même de l’opposition. Une aura qui risque fort de se transformer en tendon d’Achille ? Le PM et nombre de ministres viennent de ce côté-là du pays, une partie de l’opposition pourrait lui prêter allégeance. Des rumeurs ont fait état du soutien que pourrait lui apporter un des plus importants partis de l’opposition dite radicale, ce ne manquerait certainement pas d’irriter Ould Abdel Aziz. Il faut y ajouter que certains partenaires étrangers verraient en lui un bon successeur d’Ould Abdel Aziz parce qu’il maîtrise bien la géopolitique de la région, particulièrement en matière de sécurité.
DL (Le Calame)