Dans un tournant révélateur de la tension entre pouvoir politique et liberté d'expression en Mauritanie, la récente décision d'un juge d'instruction d'incarcérer l'ancien Sénateur Mohamed Ghadda, suite à une plainte en diffamation déposée par l'entreprise BIS TP, propriété de l'homme d'affaires Zein Abidine Ahmed Mahmoud, soulève des questions préoccupantes sur la direction prise par le pays en matière de gouvernance et de respect des droits fondamentaux.
Ghadda, connu pour ses critiques virulentes à l'égard des malversations présumées dans les marchés publics, il a longtemps été perçu comme une voix courageusement engagée dans la lutte contre la corruption ; et qui dérange. La décision de le placer en détention, loin de paraître comme une simple procédure judiciaire, est interprétée par nombre d'observateurs comme un signal inquiétant envoyé par les autorités mauritaniennes. Cette démarche suggère une tentative de museler une figure emblématique de l'opposition et de la contestation, dans un contexte où la transparence et la liberté d'expression sont cruciales pour la démocratie.
La mise en prison de Ghadda, à l'approche d'une échéance électorale importante pour le président Mohamed Cheikh El Ghazouani, pourrait être perçue comme une manœuvre politique visant à éliminer toute voix dissidente susceptible d'ébranler la confiance du public dans le processus électoral. Une telle action porte atteinte non seulement à la réputation de Ghadda mais également à l'image du régime actuel, donnant l'impression d'une administration plus préoccupée par la préservation de ses intérêts et ceux de ses alliés que par le bien-être de ses citoyens ou l'intégrité de son administration.
En effet, en s'attaquant à des figures de la société civile, sous couvert de procédures légales, les autorités risquent de saper la confiance du public dans les institutions judiciaires et politiques du pays, à un moment où la Mauritanie a plus que jamais besoin de renforcer son engagement envers la démocratie et la bonne gouvernance. Cette affaire révèle une tension fondamentale entre la nécessité de protéger la réputation et les intérêts commerciaux et l'impératif de préserver la liberté d'expression, pilier de toute société démocratique.
Le Groupe parlementaire Espoir Mauritanie a indiqué qu’il a été surpris d'apprendre l'arrestation de l'ancien sénateur Mohamed Ghadda, Président de l'ONG, Transparence inclusive suite à la publication de plusieurs rapports dénonçant d'importants dossiers de corruption dans plusieurs secteurs.
A cette occasion, il a fait une Déclaration en ces termes : « Nous condamnons fermement l'arrestation du sénateur et la tentative de faire taire toute voix qui tente de dénoncer la corruption sous le régime actuel, et nous exigeons sa libération immédiate. Nous dénonçons la série de restrictions des libertés, la lutte contre la transparence, l'autonomisation de la corruption et des corrompus, et la lutte contre tous ceux qui s'y opposent.
Nous appelons l'opinion publique, les médias, les blogueurs, les parlementaires et toute la société civile à s'élever contre les pratiques du régime visant la restriction des libertés, la propagation de la corruption et la protection des corrompus et les tentatives de neutraliser tous les organes de contrôle et d'inspection ».
Ainsi donc, la décision du juge d'instruction apparaît ainsi comme un mauvais signal, non seulement pour la société civile mauritanienne mais aussi pour les partenaires internationaux de la Mauritanie, attentifs aux progrès du pays en matière de droits de l'homme et de gouvernance démocratique. Il est crucial que les autorités mauritaniennes reconnaissent que le chemin vers la stabilité et le développement passe par le respect des libertés fondamentales et le dialogue, plutôt que par la répression des voix critiques.
Pour le Président Ghazouani et son administration, la période à venir est cruciale. Ils se trouvent à un carrefour où les choix faits aujourd'hui détermineront, non seulement, l'issue des prochaines élections mais façonneront également l'avenir politique et social de la Mauritanie. C'est une opportunité de montrer un engagement véritable envers les principes de la démocratie et de la bonne gouvernance, en garantissant que les critiques et les voix dissidentes, telles que celle de Ghadda, puissent s'exprimer librement, sans craindre des représailles pour avoir simplement exercé leur droit à la liberté d'expression.