Dans une longue interview accordée à Jeune Afrique, le président du Niger, Mohamed Bazoum, laisse peu de mystère sur la situation actuelle du G5 Sahel. « Le dispositif G5 Sahel connaît en ce moment une sorte de panne », a-t-il affirmé.
Ces propos de Mohamed Bazoum interviennent à la lumière de la décision française, marquée par la réduction des effectifs, la fermeture des bases du Nord Mali et une réactualisation de la lutte antidjihadiste autour d'une alliance internationale associant tous les Européens, la force Takuba.
Récemment, en visite au Burkina Faso, le président du Niger et son homologue burkinabè Roch Marc Christian Kaboré avaient réaffirmé, au sujet de la lutte contre le terrorisme au Sahel, leur volonté de poursuivre le plaidoyer auprès du Conseil de sécurité de l’ONU et de leurs partenaires afin de mettre en place un mécanisme garantissant un financement pérenne de la force conjointe du G5 Sahel.
Si les relations sont au beau fixe entre Niamey et Ouagadougou, ce n’est pas le cas entre Niamey et Bamako, engagé avec le G5 Sahel dans la lutte contre les groupes terroristes, aux côtés de Nouakchott et Ndjaména. Les tensions entre Bamako et Niamey semblent avoir cassé l’ambiance au sein du G5 Sahel, après des déclarations du président nigérien jugées peu courtoises par les autorités de la transition maliennes.
« Notre attitude vis-à-vis du Mali est à la fois singulière, responsable, conséquente et honnête, dans l’intérêt de nos deux peuples. C’est en vertu de cette éthique que nous disons aux dirigeants de ce pays qu’ils se trompent de voie en s’isolant, en remettant en cause leurs alliances et en faisant fi de l’agenda que leur a conseillé la Cedeao », a estimé Mohamed Bazoum.
« Si ceux qui nous insultent aujourd’hui, depuis Bamako, pensent qu’ils sont sur le bon chemin, grand bien leur fasse. Je suis pour ma part convaincu que les jeunes officiers actuellement au pouvoir ont tout intérêt à organiser rapidement des élections, afin que nous puissions faire face, ensemble, aux vrais problèmes de la région. Ils ont tout intérêt à nous écouter nous, Nigériens, qui leur avons témoigné notre fraternité quand leur pays était menacé de sécession », a encore ajouté le président du Niger.
Interrogé sur la présence du groupe russe paramilitaire Wagner au Mali, Mohamed Bazoum affirme : « Je ne vois aucune objection à ce que le Mali entretienne de bonnes relations, y compris dans le domaine militaire, avec la Fédération de Russie. Je ne conseille pas pour autant à ses dirigeants de se lier à une société privée, ce qui est manifestement incompatible avec la présence de nombreuses forces alliées qui opèrent sur leur territoire, dans l’intérêt du pays. Ce n’est pas la solution. »
Ce lundi, une délégation du Conseil de sécurité des Nations Unies a rencontré le président nigérien Mohamed Bazoum à Niamey, après avoir été au Mali, la veille, pour s’enquérir du processus de la transition.
Lors d'un point de presse à l'issue de la rencontre, l'ambassadeur du Kenya à l'ONU qui est le président en exercice du Conseil a réaffirmé l'engagement de son institution à soutenir le G5 Sahel en général et le Niger en particulier, dans cette lutte contre le terrorisme.
"L'ensemble des membres souhaitent et doivent soutenir le Niger (ainsi que) le G5 Sahel dans la lutte contre le terrorisme, sur la base de la solidarité", a-t-il déclaré.
Par Babacar BAYE NDIAYE, journaliste à Cridem