Rebondissement au MHA : Qu’est-ce qui fait courir le ministre? | Mauriweb

Rebondissement au MHA : Qu’est-ce qui fait courir le ministre?

mer, 17/03/2021 - 16:59

Sid’Ahmed Ould Mohamed, ministre de l’hydraulique et de l’assainissement, ne sait plus sur quel pied danser. Sa mauvaise gestion devenue notoire ne trompe plus ses propres collègues au gouvernement. Dans ce qui s’apparente à un scandale où il est désavoué par l’interface du gouvernement pour les bailleurs de fonds, sa stratégie, pour sauver sa tête un laps encore, est de se faire passer pour une victime n’hésitant pas à impliquer, par ricochet, le président de la République dans cette affaire. 

L’affaire du marché du projet d’alimentation en eau potable de l’Aftout Echerghi, un prêt supplémentaire du FADES, commence à exaspérer en haut lieu. Malgré la campagne médiatique dont l’instigateur ne semble être que le ministre lui-même pour se prémunir du retour du bâton, la réalité est que par lettre du ministre de l’économie N°169 en date du 26 février 2021, le ministre de l’hydraulique se voit désavoué dans sa démarche surprenante d’ailleurs d’ajourner le marché d’étude et de contrôle attribué en bonne et due forme au groupement SGIE-CIRA. Et ce n’est pas n’importe qui qui avise le MHA de son erreur manifeste. Mais revenons encore sur ce marché et ses secousses telluriques que nous avions pointées en leur temps.

Récapitulatif des principales étapes du projet

Tout a commencé en Octobre 2020. En effet, par lettre N°478 du 26 octobre 2020, le ministre Sid’Ahmed Ould Mohamed et son secrétaire général recommandent l’attribution d’un marché de gré-à-gré au bureau d’études SGIE-CIRA en charge de la supervision des travaux lors de  la première phase du projet Aftout Echerghi. A ce stade, il faut rappeler que la Convention entre notre pays et le Fades n’avait même pas encore été ratifiée par le président de la République. La ratification n’interviendra que le 21 décembre 2020. Mais passsons…

Suite à ce courrier, et par lettre N°2020-8-0210308 en date du 16 novembre 2020, le Fades accède à la demande du ministre et notifie au gouvernement son avis de non objection pour passer un tel marché.

Dans le même sillage, l’extrait de décision du PV N°55, séance du 24-12-2020, la commission des marchés du ministère de l’hydraulique et de l’assainissement approuve l’attribution du marché au groupement des bureaux d’études et de contrôle SGIE-CIRA pour un montant de 2 millions 291522 euros. Idem pour un pallier plus haut. En effet, dans l’extrait du PV N°2 du 06 janvier 2021, la Commission nationale de contrôle des marchés publics approuve également ledit marché.

Et la procédure suit son cours. Par lettre N°13 en date du 14 janvier 2021, le coordinateur du projet soumet officiellement le projet à la signature du ministre y joignant les approbations des commissions des marchés et du Fades. Le 20 janvier 2021, soit une semaine plus tard, le ministre Sid’Ahmed Ould Mohamed signe lui-même l’approbation dudit marché. Jusqu’ici tout semble parfait.

 

Marché signé par le ministre

Mais le 04 février 2021, le ministre change de cap ; le revirement est total et par courriel électronique via son secrétaire général, Madi Ould Taleb, le ministre saisit directement le Fades pour lui demander l’ajournement du projet. Pour quelle raison ? Velléités de transparence, explique notre ministre. Mais il y a anguille sous roche car les raisons du blocage invoquées par le ministre ne sont pas évidentes dans un département où les marchés d’entente directe et de gré-à-gré sont légion. Il faut assurément chercher les raisons ailleurs.

Les conclusions des inspections, pas du goût du ministre

Mais visiblement le ministre avait pris des libéralités dont il n’avait pas conscience des incidences ni pour le gouvernement, ni pour les populations encore moins pour lui-même. Ainsi les 11 et 12 février 2021, une inspection du ministère est à pied d’œuvre pour éplucher les conditions de passation dudit marché. Elle est chargée de faire la lumière sur deux points essentiels :

-la procédure  suivie dans la passation de ce marché

-les arguments et/ou justificatifs pour passer le marché.

Le 12 février 2021, à l’issue de cette mission d’inspection, la conclusion à laquelle elle aboutit est que le marché a suivi une procédure normale et justifiée et que conformément au décret N°126 du 12-11-2017, «ne peut en aucun cas être résilié ». Une conclusion qui ne plait au ministre comme s’il lorgnait la tête d’une personne.

 

Il suscite une nouvelle mission d’inspection, deux jours plus tard. La seconde mission conclut que : «le ministre de l’hydraulique et de l’assainissement a signé le marché en procédure normale cependant il exige le principe de la transparence justifiée par l’apparition de tous les documents en relation avec le marché ».

 

C’est vrai que cela fait rire mais pleurons-en car le manège n’est pas terminé. Acculé par sa mal gouvernance, le ministre cherche un expiatoire ou plutôt un bouc-émissaire. Ainsi le 13 février 2021 et pour parer aux conséquences de sa gestion désastreuse, il improvise une sortie médiatique ; un show pour se dédouaner des marchés d’entente directe ou de gré-à-gré. Ce qui est archi-faux et ne résiste pas au contrôle.

 

Réalité d’une pratique hors la loi !

«Je n’ai jamais signé et je ne signerai jamais un marché de gré-à-gré » scandait le ministre pour qui peut encore le croire. Pourtant, il ne s’embarrasse guère des précédents. Des coïncidences même. Le 04 février 2021 alors qu’il demande au Fades de surseoir au marché de l’Aftout Echerghi, il introduit via le SG Madi Ould Taleb, par lettre N°57 (même date du 4 février) une demande auprès de la commission des marchés du département pour sceller deux marchés d’entente directe. Il s’agit du marché pour le contrôle des travaux de l’adduction d’eau potable de Walata pour 290 millions d’ouguiyas, financée par la Banque Islamique de Développement (BID). Le second marché d’entente directe concerne la réalisation des travaux d’alimentation en eau potable de la ville de Walata à partir de la nappe du Dhar (projet Dhar) pour un montant de 7 millions USD sur financement BID également. Ce dernier marché a été attribué par entente directe (encore) à la Société ABT-TP.  Il y a bien un secret à cette duplicité du ministre. Ces entreprises étaient-elles plus convaincantes ? Sans doute…

Plus on s’intéresse à la gestion du ministre, plus on découvre une avalanche de marchés d’entente directe. C’est la seule règle qui vaille. D’ailleurs, dans une lettre N°217 en date du 7 décembre 2020 déjà, le champion des marchés d’entente directe, Sid’Ahmed Ould Mohamed, adresse un courrier au PM lui demandant son autorisation pour en passer. Une proposition suspicieuse d’ignorance ou de vouloir mouiller avec lui le premier Ministre, qui n’a donné aucun écho à cette sollicitation du domaine des commissions de passation des marchés et des bailleurs de fonds. Mais rien ne semble devoir arrêter cette boulimie en marchés douteux du ministre qui s’appuie beaucoup sur le nouveau secrétaire général, Madi Ould Taleb. Ainsi par lettre N°32 en date du 25 janvier 2021, il sollicite aussi la passation par entente directe d’un marché pour l’alimentation de la ville de Nouadhibou. Une lettre par laquelle il demande l’avis de non objection du Fades à propos d’un marché d’entente directe avec le bureau d’études Sonede international (Tunisie) relatif au projet d’Adduction d’Eau Potable de la ville de Nouadhibou à partir de la nappe de Boulenouar. Le Fades a catégoriquement rejeté cette demande, sans doute en relation avec la prétendue transparence que le ministre invoquait pour le marché ajournée de l’Aftout Echerghi. L’arroseur se retrouve aujourd’hui arrosé.

En définitive, le ministre de l’hydraulique semble avoir créée plus de problèmes qu’il n’en a résolus pour le gouvernement. Son sort est clair mais il s’accroche encore à sa stratégie de recherche de bouc-émissaire. Il n’hésite même plus pour sauver sa peau à user de subterfuges pour s’attaquer à ses collègues, ses collaborateurs et même au président qu’il croit acculer par ses insinuations. C’est ce qu’il fait croire sur les réseaux sociaux. Assurément, ça voltige très bas. 

JD