«Il y a des périodes où l’eau change de couleur et tue les poissons. Il faut qu’on soit sensibilisé sur les enjeux maritimes pour avoir une mer propre et beaucoup de poissons. »
Ces propos sont de M. Alioune Fall, pêcheur rencontré à la plage des pêcheurs de Nouakchott vendredi. Comme lui, beaucoup de pêcheurs déplorent les effets produits par une importante flotte de pêche opère des milliers de navires de commerce qui fréquentent les ports du pays ou qui sillonnent le large en empruntant les voies de navigation maritime.
« Ces navires génèrent d’importantes quantités de déchets liquides (hydrocarbures, eaux usées) et solides (débris, ordures) provenant de leur exploitation et de leur propre fonctionnement. Ces déchets sont souvent rejetés par-dessus bord car pour les marins, la mer est souvent considérée comme un infini où tout pouvait disparaître alors que le navire était un monde restreint où manquait la place. »Souligne un spécialiste de l’environnement marin qui a rappelé par ailleurs que les activités pétrolières et gazières, peuvent présenter des risques écologiques pour le milieu marin et surtout pour les zones vulnérables du point de vue environnemental et/ou écologique.
« Parmi les risques importants il y a les pollutions accidentelles ou intentionnelles ou encore celle due à l’exploitation sans compter les dommages matériels causés aux habitats ou organismes marins. » A-t-il rajouté.
«Une mer polluée ne respire plus ! »
Crédit photo: Hawa Bâ
D’un autre point de vue, il existe des débris en mer qui menacent d’extinction de nombreuses espèces dont la vie dépend de l’espace marin. Les poissons, les oiseaux, des mammifères et autres amphibiens sont ainsi exposés. « On estime à 7% les espèces marines qui ont disparu. Un tiers des espèces pêchées ont vu leurs populations diminuer de 90%. » Informe M. BABANA YAHYA, expert maritime qui explique que malheureusement, les dangers menaçant la biodiversité marine ne proviennent pas uniquement du côté de la mer. « Ils sont aussi d’origine tellurique car selon une étude du Programme des Nations Unies pour l’Environnement, 75% des débris trouvés en mer proviennent de la terre. » A poursuivi M. BABANA YAHYA non sans prévenir : « Une mer polluée ne respire plus » ! La mer a besoin de cette oxygène pour un foisonnement de la vie dans les milieux aquatiques ».
Du côté des Organisations de la Société Civile, plusieurs Associations professionnelles et des ONG ont déjà engagé des actions citoyennes pour faire face à ce fléau.
crédit photo: Hawa Bâ
Selon un membre des “Initiatives Océanes” de l’association Surf Rider Fondation qui intervenait à la faveur de la journée de nettoyage de la plage Titanic de Nouakchott, « l’idéal serait qu’elle (la plage) soit constamment nettoyée et que le citoyen mauritanien prenne conscience de sa valeur et qu’il la reconsidère autrement qu’une grande machine à laver. » Selon cet intervenant, tout est question d’éducation, de bonne manière et de civilité. « Il faut prendre conscience de l’ampleur du geste quotidien qu’est de jeter n’importe quoi, n’importe où. Une fois jetés à la mer, cette dernière les rejette à son tour, d’où l’insalubrité des plages. » A souligné ce militant pour la mer qui a attiré l’attention sur la responsabilité de l’homme.
Une responsabilité soulignée par ailleurs du côté du ministère de l’environnement où l’on rappelle que les différents déchets qui impactent l’environnement marin et côtier proviennent des activités humaines.
Pour une mer viable, la responsabilité humaine engagée…
La pèche, l’exploration et l’exploitation pétrolière et gazière, le trafic maritime, les déchets provenant des villes côtières, le tourisme balnéaire, les émissions gazeuses, les rejets liquides et les rejets solides, les émissions gazeuses provenant de la combustion hydrocarbures fossiles utilisés dans les bateaux, etc. ont fait partie d’une longue liste énumérée par M. MOHAMED OULD ABDELLAHI Ould SELMEdirecteur adjoint du contrôle environnemental au Ministère de l’environnement et du développement durable.
Ils pointent un doigt accusateur sur « les activités d’exploration pétrolière dans les eaux qui exercent des pressions, aux conséquences désastreuses sur l’environnement marin et sa diversité biologique. »
Protéger le milieu marin demeure un enjeu environnemental pour lequel plusieurs instruments juridiques et dispositifs opérationnels sont mis en place par les autorités mauritaniennes.
Etat côtier, la Mauritanie a l’obligation de faire respecter la réglementation internationale en matière d’environnement dans les eaux placées sous sa juridiction, d’une part et de préserver ses ressources halieutiques, d’autre part. Or si l’on considère que le littoral mauritanien abrite des Aires Marines Protégées (AMP) dont le Parc National du Banc d’Arguin (PNBA), le pays dispose de l’une des plus vastes AMP d’Afrique.
Action: Plan d’Intervention d’Urgence POLMAR-Mer
Le PNBA est d’ailleurs classé patrimoine International de l’Humanité compte tenu de son caractère d’écosystème dynamique jouant un rôle éminemment important dans l’équilibre de la vie marine dans la zone économique exclusive de la Mauritanie et celles des pays de la sous-région.
Pour contrecarrer tous les risques de pollutions accidentelles par les hydrocarbures et autres substances nocives, la Mauritanie a adopté un Plan d’Intervention d’Urgence POLMAR-Mer. Selon les autorités, ce plan est conçu de sorte à pouvoir se connecter aux autres plans d’urgence des pays de la sous région et même au-delà. De même, les plans spécifiques des installations pétrolières offshores,des ports et ceux des terminaux portuaires peuvent, lorsque l’ampleur d’une pollution dépasse leurs capacités de lutte, se connecter au plan POLMAR-Mer.
Les dames sont des poissons de nettoyage sur la plage à Nouakchott, Mauritanie (source: Dreamstime)
L’autre action porte une synergie entre Etat et ONG pour diminuer l’impact des déchets sur le milieu marin et côtier. Le ministère de l’environnement et du développement durable travaille avec le secteur privée et la société civil pour développer un cadre juridique et réglementaire pour persévérer l’environnement marin et côtier contre les effets néfastes des activités humaines.
C’est ce qu’a souligné M. MOHAMED ABDELLAHI OULD SELME qui a indiqué que « le code de l’environnement et ses décrets d’application relatifs aux études d’impact d’environnement (EIE) exigent une EIE pour toute les activités. « Un plan de gestion environnementale et sociale (PGES) doit être mis en œuvre pour atténuer les effets négatifs des projets de développement. Les ONG agissent également par la sensibilisation, la formation et le renforcement des capacités pour atteindre les mêmes objectifs de gestion durable des ressources naturelles et d’élimination, par une procédure écologiquement saine, des déchets gazeux, liquides et solides. » A conclu le directeur adjoint du contrôle environnemental.
Hawa Bâ
initiativesnews.com