Deuxième réunion de la Commission suprême de réforme de la justice : Le Président El Ghazouani impulse une réforme ambitieuse pour la modernisation du système judiciaire | Mauriweb

Deuxième réunion de la Commission suprême de réforme de la justice : Le Président El Ghazouani impulse une réforme ambitieuse pour la modernisation du système judiciaire

mer, 21/05/2025 - 23:47

Le Président de la République, Mohamed Cheikh El Ghazouani, également Président du Conseil Suprême de la Magistrature, a présidé mardi soir au Palais présidentiel la deuxième réunion de la Commission suprême de Réforme de la Justice. Cette instance stratégique a adopté un plan d’action urgent pour 2025, marquant une étape clé dans la modernisation du système judiciaire et la lutte contre les dysfonctionnements chroniques.

Un plan d’action 2025 pour une justice "efficace et proche des citoyens"

À l’issue des travaux, le ministre de la Justice, Mohamed Mahmoud Cheikh Abdallahi Boya, a présenté un communiqué détaillant les décisions phares validées par la Commission. Celles-ci s’articulent autour de six axes majeurs, combinant renforcement des ressources humaines, innovations technologiques et révision de textes législatifs obsolètes.

1. Renforcer les capacités judiciaires

La création de l’Institut Supérieur de Formation Judiciaire figure en tête des priorités. Cet organe visera à améliorer l’expertise des magistrats et des auxiliaires de justice, avec une accélération des procédures pour son opérationnalisation. Parallèlement, le recrutement de 20 juges dès 2025, puis annuellement pendant cinq ans, et de 20 greffiers par an sur la même période, répond à la pénurie criante de personnel qualifié. Les greffiers bénéficieront également d’une indemnité spéciale de travail, au même titre que les juges, afin de revaloriser ces métiers essentiels.

2. Numériser l’appareil judiciaire

Le volet technologique occupe une place centrale, avec la commande d’une étude diagnostique pour moderniser l’infrastructure IT du secteur. Parmi les mesures concrètes :

La mise en place d’un système web pour traiter les demandes de nationalité.

Le développement de sites internet pour les tribunaux et l’administration judiciaire, afin de renforcer la transparence et l’accessibilité.

3. Réviser les textes législatifs : urgence anti-drogue et procédures accélérées

La Commission a acté une refonte majeure de plusieurs codes, dont :

-La loi sur la lutte contre la drogue (datant de 1993), jugée inadaptée face à l’explosion des trafics. Les amendements prévoient des définitions claires des infractions, des sanctions alourdies pour les trafiquants, des méthodes d’enquête spécialisées et des mécanismes de détection de la toxicomanie ;

-Le code de procédure pénale, révisé pour garantir des procès équitables, limiter la détention provisoire et intégrer des techniques d’enquête modernes ;

-Le code de procédure civile, modifié pour mettre fin aux litiges chroniques en permettant à la Cour suprême de trancher définitivement un dossier lors de son deuxième recours.

4. Éthique et indépendance de la justice

Un code de déontologie révisé pour les juges renforcera la lutte contre les comportements contraires à l’impartialité, avec un rôle accru de l’Inspection générale de l’administration judiciaire. Les auxiliaires de justice (avocats, notaires, etc.) se verront également imposer un code de conduite strict pour prévenir les influences externes.

5. Langues nationales : garantir l’accès à la justice pour tous

Pour pallier les barrières linguistiques, la Commission a acté le recrutement urgent de 32 traducteurs judiciaires en langues nationales, pris en charge financièrement par l’État. Ce nombre devrait être augmenté dans les prochaines années.

Un suivi interministériel rigoureux

Le Président El Ghazouani a insisté sur l’approche collaborative de cette réforme, impliquant plusieurs ministères clés (Intérieur, Transformation numérique, Budget, etc.) et la Cour suprême. Quatre comités de suivi, pilotés respectivement par le Premier ministre, le ministre de l’Intérieur, les walis et les hakems, veilleront à la mise en œuvre des mesures.

Cette réforme s’inscrit dans le cadre du Document National pour la Réforme et le Développement de la Justice, promesse phare du chef de l’État. « Il s’agit de construire une justice crédible, indépendante et capable de répondre aux attentes des citoyens », a rappelé le communiqué.

Avec ce plan ambitieux, la Mauritanie affiche sa volonté de tourner la page des lenteurs administratives et des lacunes législatives, tout en s’attaquant à des défis sociétaux majeurs comme la criminalité liée à la drogue. Reste à concrétiser ces engagements dans un calendrier serré, alors que le pays vise à incarner un modèle de réforme judiciaire en Afrique de l’Ouest.