Les réformes répétitives et souvent mal adaptées du système éducatif mauritanien continuent de compromettre gravement l’avenir de la jeunesse. Moins de 20% d’une génération parvient à décrocher le baccalauréat, un indicateur alarmant qui reflète l’échec systémique. Les récentes annonces, comme l’introduction de la technologie et de l’informatique dès le collège, montrent un décalage flagrant entre les ambitions du ministère de l’Éducation et la réalité sur le terrain.
La ministre de l’Éducation nationale, Houda Mint Babah, a mis en avant plusieurs mesures, dont la généralisation de l’enseignement public pour les trois premières années fondamentales et la réduction du cursus au collège de 4 à 3 ans. Toutefois, la mise en œuvre de ces réformes révèle un manque de préparation. Comment intégrer des matières aussi techniques que la Technologie et l’Informatique dans des établissements où l’électricité et le matériel informatique sont inexistants ?
En Mauritanie, de nombreuses écoles manquent des infrastructures essentielles, rendant toute tentative d’innovation technologique caduque. Le déficit criant d’enseignants qualifiés dans ces matières aggrave le problème. La formation continue de 80% des enseignants en sciences exactes, mentionnée par la ministre, ne suffit pas à compenser l'absence de compétences spécialisées dans d'autres domaines cruciaux.
Si l’on se tourne vers des pays voisins comme le Ghana et la Côte d’Ivoire, on constate que ces nations ont pris des mesures concrètes pour moderniser leurs systèmes éducatifs et combler la fracture numérique. Au Ghana, par exemple, plus d’un million de tablettes informatiques ont été distribuées gratuitement à chaque lycéen du système public, une initiative lancée dans le cadre du projet « Smart Schools ». De même, en Côte d’Ivoire, des tablettes numériques sont devenues un outil courant dans les salles de classe, facilitant l’accès aux ressources pédagogiques numériques.
L’Algérie, quant à elle, poursuit sa transformation numérique en équipant 1 700 écoles primaires supplémentaires de tablettes numériques, tandis qu’à l’île Maurice, depuis 2014, un programme similaire intitulé « un élève, un ordinateur » permet à des milliers d’élèves de bénéficier d’outils technologiques adaptés. En comparaison, la Mauritanie accuse un retard considérable, peinant à offrir un accès même basique à des ordinateurs dans la majorité de ses établissements scolaires.
La mise en place de l’uniforme scolaire en Mauritanie, présentée comme une mesure de cohésion sociale, ne peut masquer les lacunes fondamentales du système éducatif. En effet, si l’uniformisation peut être vue comme un symbole d’égalité, elle reste une initiative superficielle face à l’ampleur des problèmes structurels, tels que le manque d’infrastructures adaptées, l’absence d’enseignants qualifiés et l’inadéquation des réformes avec les besoins réels du pays.
Dans des pays comme le Ghana, l'introduction de la technologie est accompagnée d’un investissement massif dans la formation des enseignants et l'amélioration des infrastructures, une démarche qui fait cruellement défaut en Mauritanie. Sans une base solide pour soutenir ces réformes, introduire des matières comme l’informatique dans un tel environnement revient à creuser davantage le fossé entre les ambitions affichées et la réalité.
Les réformes précipitées et mal adaptées en Mauritanie compromettent gravement l’avenir des jeunes. Comparée à ses voisins, la Mauritanie semble incapable de suivre le rythme des avancées technologiques qui transforment l’éducation dans la région. Sans investissements significatifs dans les infrastructures et une révision en profondeur des priorités éducatives, la jeunesse mauritanienne risque de rester à la traîne, éloignée des opportunités du XXIe siècle.
Il est grand temps de repenser les réformes actuelles pour qu’elles répondent aux véritables besoins des élèves et qu’elles soient soutenues par des infrastructures et une formation adéquate, afin d’offrir à tous les jeunes Mauritaniens une éducation de qualité.