Jeune Afrique - Toujours poursuivi pour corruption, blanchiment d’argent et enrichissement illicite, entre autres, l’ancien président vient de recruter un ténor du barreau algérien. Un choix très politique pour tenter de faire sortir son dossier de l’inertie.
Les mois passent et Mohamed Ould Abdelaziz apparaît de plus en plus isolé. Alors que de lourdes charges pèsent toujours contre lui, « Aziz » a personnellement recruté début février l’avocat algérien Bachir Mecheri. Celui-ci est l’un des ténors et des doyens du barreau algérien.
Par son intermédiaire, l’ex-chef de l’État, qui n’a par ailleurs jamais été indifférent à la question sahraouie (car il est sensible à l’existence d’un « ensemble maure »), espère rallier l’Algérie à sa cause. Et présenter son successeur, Mohamed Ould Ghazouani, comme étant plus proche du Maroc.
Maître Mecheri connaît tous les rouages politiques de son pays pour avoir eu à gérer des dossiers très médiatiques comme ceux de Abassi Madani et Ali Belhadj, les dirigeants du Front islamique du salut (FIS), au début des années 1990.
Il a également défendu le général Hocine Benhadid, qui fut la bête noire de l’ancien chef d’état-major de l’armée Ahmed Gaïd Salah ou encore le journaliste algéro-britannique Mohamed Tamalt, décédé en prison en 2021 après avoir observé une grève de la faim.
Le 27 février, l’avocat s’est donc rendu à Nouakchott afin de s’entretenir avec son client, en résidence surveillée dans sa villa du quartier des Bourses. Selon l’entourage d’Aziz, les policiers en faction jour et nuit devant son domicile auraient refusé de laisser Mecheri entrer bien qu’il ait été muni d’un mandat en bonne et due forme.
Il serait finalement reparti le 3 mars sans avoir pu voir l’ex-chef de l’État. Dans cette affaire, le conseil sera d’abord chargé de dénoncer les conditions de détention d’Aziz.
« Prison à ciel ouvert »
À sa sortie du Centre national de cardiologie, début janvier, celui-ci n’a pas été réincarcéré à l’École de police de Nouakchott. Le contrôle judiciaire dont il fait l’objet a été modifié et il a été assigné à résidence.
Mais ses visites sont filtrées, ce qui transforme sa maison en « prison à ciel ouvert », selon ses avocats. Bachir Mecheri suivra ensuite la plainte déposée en 2021 par ses confrères devant les Nations unies pour, entre autres, « détention arbitraire », « violation des droits constitutionnels », « pressions policières » et « instrumentalisation du pouvoir judiciaire ».
En octobre 2021, Mohamed Ould Abdelaziz avait déjà mandaté un nouveau conseil, le Français Raphaël Constant. Mais ce dernier n’est toujours pas venu à Nouakchott.
Par Justine Spiegel