Pouvez-vous nous dire quelles fonctions assurent les Services Techniques ? La Géologie, cela semble évident, car il est question de minéraux. Mais qu’en est-il des autres sections ?
Chris : il y a quatre sections dans le département. Géologie, Géotechnique, Topographie et Ingénierie. La Topographie a deux fonctions : la première est de placer des piquets, bandes de signalisation et autres marquages spécifiques dans la mine pour guider les opérateurs dans leur travail. L'équipe vérifie aussi la conformité des travaux réalisés avec le plan. La seconde est celle du reporting : les chiffres de production sont fournis quotidiennement et il y a une réconciliation chaque quinzaine du mois, pour déterminer le tonnage réel.
Les Géotechniciens ont une fonction clé qui est de mesurer les roches afin de suivre tout mouvement dans la fosse et de déterminer comment opérer la mine en toute sécurité.
Les Ingénieurs des Mines ont trois autres missions : la planification, les prévisions et le budget. Ils reçoivent des données de plusieurs départements : topographie, géologie minière, opérations, maintenance mobile, usine, finance… Et utilisent celles-ci pour élaborer un plan. Le plan minier détermine la quantité d'or que nous produirons, les équipements nécessaires, l'intensité de leur utilisation, etc…
Ces plans sont réalisés pour chaque jour, semaine, mois, trimestre et année, comme pour la durée de vie de la mine. Ils élaborent enfin le budget annuel, comme les prévisions trimestrielles.
Le plan journalier du Département des Mines a été décrit en détail dans la dernière édition de notre magazine et l'un de vos planificateurs, Ahlam, nous a donné cette fois-ci un aperçu sur les plans hebdomadaires. Réalisez-vous aussi les plans à long terme ?
Chris : il y a un plan journalier, un plan chaque semaine, un plan chaque mois et tous les deux mois aussi : le plan glissant sur 3 mois. Les Ingénieurs travaillent sur le moyen et long terme et nous assurons aussi la planification à long terme, pour la durée de vie de la mine. Il y a donc un plan chaque trimestre et nous avons aussi une vision pour l'année. Ensuite, les plan miniers et budgets annuels sont élaborés et cela donne une vision sur trois ans. Puis le plan stratégique : pour la durée de vie de la mine. Tous sont différents les uns des autres.
L'équipe technique de Toronto a-t-elle une contribution ? Quel est leur soutien ?
Chris : ils assurent aussi un contrôle technique et évaluent les options stratégiques : tel que miner en sous-sol par exemple… Cette année est aussi la première au cours de laquelle Tasiast développe un plan stratégique. Avant, l’équipe technique de Toronto s’en chargeait.
Si le plan minier relève de vos services, quelle est alors la responsabilité du Directeur de la Mine ? Comment interagissez-vous ?
Chris : nous planifions leur activité : les Services Techniques élaborent le plan et les opérations minières le réalisent sur le terrain, puis nous vérifions que le plan a été suivi et faisons sa révision. Les plans doivent toujours être révisés et mis à jour, car il y a toujours une différence : des dépassements, des sous-performances… Nous devons toutefois veiller à toujours atteindre nos objectifs.
Il y a aussi de nombreuses interactions : via des réunions quotidiennes tout comme ensemble dans la fosse. Des interactions avec la Maintenance Mobile aussi, car nous devons déterminer comment seront utilisés les engins, quand ils seront disponibles… Nous travaillons aussi en collaboration avec l’usine, car notre plan détermine le tonnage envoyé et son contenu en or. D'un autre côté, ils ont leur plan aussi pour le broyage, avec des arrêts pour la maintenance.
Vous êtes arrivé à Tasiast en juillet 2016, après le départ d’une partie de l’équipe, comme une compression. C'était une période de grèves, suivie de problèmes concernant la gestion des expatriés. Qu’avez-vous pensé ?
Chris : quand je suis arrivé, un certain nombre d'expatriés venaient de partir. La première priorité a donc été pour moi de recruter des remplaçants et d’accélérer le développement du personnel local, un premier point étant de trouver de bonnes recrues parmi les expatriés. Tous les expatriés n'ont pas été remplacés, seul certains postes ont été remplacés.
Parlons des expatriés que vous avez supervisés. Quelle a été leur contribution ?
Chris : les expatriés étaient : Trampis Lemons (Topographie), Charles Mkandawire (Géotechnique), Billy Whalen (Ingénierie minière), Mohamed Abdelkerim et Peter Shankaya (Ingénieurs des Mines) et Benoit Poupeau (Géologie). Trampis et Charles sont partis au cours des deux années passées. Billy, Peter et Kerim, les Ingénieurs miniers, terminent maintenant. Chacun a fourni un appui technique à sa section, avec un fort accent sur le développement du personnel. Tous sont des professionnels très expérimentés, qui ont travaillé de nombreuses années dans les mines.
Maintenant que certains postes de votre département sont repris par les Mauritaniens, comment vous comparez-vous à d'autres unités comme la maintenance des Équipements Mobiles par exemple, ou l’usine ?
Chris : je ne peux pas vraiment dire, je ne connais pas leur situation en détail. Depuis décembre, mon département ne compte plus que deux expatriés : Benoit et moi-même. Toutes les sections sont maintenant gérées par des mauritaniens : Moulaye pour la Géotechnique - Hamadi pour la Topographie (on l'appelle Dah), et Boubacar pour l’Ingénierie minière.
Maintenant que quatre ans ont passé depuis votre arrivée, que pensez-vous de la situation actuelle en termes de « mauritanisation » ?
Chris : je suis vraiment fier des efforts et des résultats observés dans mon service. Nos expatriés ont pris au sérieux leur responsabilité dans le développement des équipes et les Mauritaniens ont pris au sérieux l’opportunité d'en tirer le meilleur parti. Trois Surintendants sur quatre sont maintenant mauritaniens et l'équipe est bien placée pour fournir les services de qualité nécessaires pour une mine d'or de classe mondiale comme Tasiast.
Pouvez-vous nous en dire plus sur deux des Surintendants remplacés dernièrement et sur la façon dont ils ont travaillé avec les mauritaniens.
Chris : je connais bien Charles, car j'ai travaillé avec lui il y a quelques années en Zambie et au Botswana. Il a aussi déjà travaillé avec Newcrest en Australie, au Pacifique et avec AngloGold Ashanti au Ghana. Il est maintenant en Côte d’Ivoire. C’est un Ingénieur Principal en Géotechnique.
Il a mis en place une formation de haut niveau pour l’équipe d’Ingénierie Géotechnique et les a préparés à la réussite.
Trampis, d'un autre côté, a beaucoup travaillé avec Dah : il lui a appris les logiciels et les outils. Beaucoup d'efforts ont été consacrés à l'apprentissage des équipements de haute-technologie de la section : scanners laser, drones, nouveaux logiciels etc…. Ils ont également tous deux visité une expo aux USA. Deux postes ont été transférés aux Mauritaniens cette année : celui de Surintendant de la Géotechnique et celui de Topographe en Chef.
Avez-vous œuvré à cela ou était-ce simplement un parcours de carrière mis en place par les RH ?
Chris : les RH ont mis en place la structure, avec Meyvn pour le coaching, mais tout ce qui est technique constitue un prérequis dans lequel nous avons été impliqués dès le début. Nous travaillons depuis 2017 avec l’idée de confier ce processus de développement aux expatriés. C'était un engagement pour tous ceux qui ont travaillé ici. Le Département des RH a donné un cadre, le côté soft skills et la partie technique a été développée par nos services.
Nous voyons désormais comment vous avez œuvré avec le personnel local. Parlez-nous de votre parcours. Avez-vous déjà travaillé dans votre pays, en Australie ?
Chris : j'ai étudié à l'Université de Nouvelle Galles du Sud dans les années 80 et ai travaillé effectivement quelques années en Australie au début de ma carrière. Par la suite, j'ai été dans différents pays en occident et depuis vingt ans, je travaille en Afrique comme en Asie : au Congo, au Botswana, au Burkina Faso, tout comme au Surinam également.
Le partage d'expérience et le transfert de connaissances nécessitent de nombreuses qualités humaines. Comment avez-vous géré cet aspect des choses ?
Chris : quand j'ai eu mon diplôme, c'était encore le début de l’informatique et de l'informatisation. La plupart des logiciels d’applications concernaient d’ailleurs le stockage ou d'autres outils de gestion. Cela a pris un temps avant de passer à des logiciels spécialisés.
Je suis donc familier avec tous ces développements. J'ai travaillé dans le domaine et sais comment utiliser les techniques de modélisation, passer à l’informatique... Avant, nous avions des calculatrices et dessinions nos propres plans. Aujourd’hui, on utilise de la haute technologie : des radars et autres appareils high-tech comme les scanners laser, drones, les logiciels avancés qui utilisent beaucoup de mathématiques…
Avant d’interroger votre personnel et de nous intéresser au transfert de connaissances, avez-vous quelque chose à ajouter ?
Chris : je suis assez fier de ce que nous avons réalisé dans les Services techniques en termes de Mauritanisation. J'y ai travaillé ces 4 dernières années et les expatriés ont pris leur responsabilité au sérieux. Des deux côtés, formateurs et apprenants ont fait ce qu'il fallait faire et Tasiast en tirera profit.
In « BE PROUD », revue interne NUMÉRO 5, JANVIER 2021
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