Mauritanie-Pêche/ Recherches: Conclusions accablantes pour les usines de farine de poisson | Mauriweb

Mauritanie-Pêche/ Recherches: Conclusions accablantes pour les usines de farine de poisson

mar, 16/10/2018 - 10:55

Surexploitation, fausses déclarations sur les captures. Les conclusions d’un chercheur sur l’état des stocks de la sardinelle ronde sont accablantes.

«La sardinelle ronde, essentielle pour la sécurité alimentaire en Afrique de L’Ouest, continue à décliner». Le titre évocateur des conclusions du chercheur Ad Corten, Coordinateur de la coopération entre les Pays-Bas et la Mauritanie dans la recherche sur la pêche,  confirme les craintes empiriques déjà exprimées par les acteurs de la pêche artisanale mauritaniens quant à la diminution drastique des captures de sardinelle ronde (voir http://mauriweb.info/node/5158).

 

41% de chute dans les captures

L’importance de la gestion précautionneuse de la sardinelle en raison de son apport dans la sécurité alimentaire et l’emploi sur nos côtes n’est plus à démontrer. La sardinelle constitue encore un véritable cordon ombilical entre notre pays et le Sénégal voisin. Mais ce qui parait incompréhensible, tout au moins du point de vue du chercheur hollandais, c’est qu’en dépit de l’importance de cette espèce de poisson, peu d’informations scientifiques sont collectées à son sujet. Les connaissances sur ses stocks restent éparses alors qu’en même temps l’activité de farine de poisson qui la cible prend des propensions tout aussi importantes. Mais les infos sur cette espèce restent parcellaires en Mauritanie et quasi-inexistantes au Sénégal voisin malgré le soupçon d’une production de 192.000 tonnes ne prenant pas en compte l’usage de la sardinelle dans les usines de farine de poisson. En Mauritanie ces capture de sardinelle sont passées de 292 000 tonnes en 2016 à 172 000 tonnes en 2017.

Selon Corten :  « L'échantillonnage des captures artisanales en Mauritanie a été très faible en 2016 et 2017, malgré les fortes recommandations du groupe de travail de la FAO sur les petits poissons pélagiques en Afrique du Nord-Ouest. Pour le Sénégal, peu d'informations sont disponibles sur le niveau réel d'échantillonnage ». Mais en dépit de ce déficit d’information sur l’état des stocks, « toutes ces données laissent présager une nouvelle baisse du stock. Les prises de sardinelles rondes en Mauritanie sont passées de 292 000 tonnes en 2016 à 172 000 tonnes en 2017; une baisse de 41% » soit 80.000 tonnes en 2017. Plus grave, les usines (elles ne peuvent le faire sans la complicité des administrations concernées) tordraient le cou à la loi sur les quotas en procédant à de fausses déclarations. Corten rappelle, dans ce cadre, qu’en Mauritanie, « la nouvelle réglementation concernant la quantité maximale de sardinelles rondes pouvant être utilisées pour la farine de poisson (10 000 t / an / usine), certaines usines de fabrication de farine de poisson ont probablement faussement déclaré une partie des débarquements de sardinelles en bonga ». Les statistiques de déclarations de captures de Bonga, ont en effet connu simultanément une augmentation, souligne-t-il. « Les captures de bonga déclarées en 2017 ont augmenté d'environ 40 000 t , et il est probable que cette augmentation ait en réalité consisté en sardinelles rondes ».

Cette chute gravissime des captures n’est pourtant pas liée à la diminution de l’effort de pêche atteste Corten, pour qui le même nombre de pirogues et de bateaux ciblant la sardinelle est resté le même.

 

Les usines écrabouillent tout !

Le lien est de suite établi avec la prolifération des usines de poisson. Même si dans notre pays, la nouvelle loi a tenté de jouer à l’équilibrisme entre tous les acteurs, au Sénégal, qui réclame chaque année des centaines de licences en Mauritanie, et en Gambie, ces usines travaillent dans le noir. Dans notre pays, les révélations de Corten sur la pratique de fausses déclarations risquent de faire des vagues. Lui, en tout cas, ne va pas par quatre chemins et précise que s’agissant de la sardinelle, « la principale cause de cet effort accru est le développement d’une industrie de la farine de poisson dans la région». Les alertes du chercheur hollandais rappellent l’importance d’une nouvelle évaluation des stocks étant donné qu’elle « est sérieusement entravée par le manque d'échantillonnage en Mauritanie et par les mauvaises données fournies par le Sénégal au groupe de travail de la FAO »

JD