Ouf ! Les médias privés devraient souffler enfin ! Privée de publicité depuis 2012 suite à un arrêté des services de la Primature, la presse indépendante n’a jamais cessé de souffrir le martyr. Conséquences : la disparition de nombre de titres et la détérioration du pouvoir de la presse.
Lors de sa dernière session hebdomadaire, le gouvernement a adopté un projet de loi portant sur la publicité. L’information a d’abord été révélée par la ministre chargée des relatons avec le Parlement et la société civile- tutelle de la Communication- avant d’être relayée le week-end durant, par les médias.
Avec enthousiasme ! Si officiellement, cette mesure, vise à « impulser la roue de l’économie, la protection du consommateur, l’éclairage de l’opinion publique nationale et la mobilisation des ressources financières pour le secteur de la communication, à travers des annonces publicitaires transparentes », pour les journalistes de la presse privée, il s’agit surtout de la fin d’un « traitement particulièrement inamical » que leur ont réservé les Autorités ces dernières années.
Tout a commencé en 2012 après que l’IGE publie un arrêté mettant fin aux chapitres des annonces dans les médias. Pour les services de la Primature, il s’agissait de mettre fin à l’utilisation jugée « d’abusive » que certains directeurs publics et autres hauts fonctionnaires de l’État réservaient aux budgets de communication de leurs départements respectifs.
Il s’agissait aussi, de « se donner du temps » pour réorganiser le volet communication dans le secteur public. Des contrôles effectués par l’IGE avaient ainsi révélé qu’en trois ans (entre 2009 et 2012), coïncidant avec la présidence deOuld Abdel Aziz, près de 12 milliards d’ouguiyas avaient été dépensés dans différents secteurs de communication publique !
Sans laisser de trace… Dans la foulée, un compte avait été ouvert dans les livres du Trésor public dans lequel étaient immédiatement versés, les montants initialement alloués aux annonces, aux publicités, aux abonnements et même aux consultations. Les fonds ainsi réunis devaient servir à des actes d’autorité publique, tels la réhabilitation de centres de santé, d’établissements scolaires, la construction de routes…
Pour la presse privée, cette mesure visait plus particulièrement à la bâillonner voire à la détruire, l’administration publique étant, de part les annonces, les publicités et les abonnements qu’elle octroie, une imposante source de financement.
Ainsi, pendant cinq ans, la presse indépendante fut privée de publicités, du côté de l’administration publique. Heureusement, la mesure ne touchait pas le secteur privé et particulièrement, les sociétés de téléphonie qui ont conservé leur collaboration avec les médias cibles en signant avec nombre d’entre eux des contrats de prestation de services et de publicité.
Cinq ans durant, malgré vents et marées, la presse indépendante se maintint, jouant son rôle de contre-pouvoir et usant de sa force pour dénoncer, condamner mais surtout, informer. Les fonds manquants cruellement, c’est la presse papier qui a le premier souffert de cette situation.
Ils étaient ainsi très nombreux, les journaux qui ont revu à la baisse leur périodicité, et furent aussi nombreux, ceux qui ont mis la clé sous le paillasson. La presse électronique, nouveau venu dans le marché, puis la presse audiovisuelle devaient chacune à leur tour, pâtir de la situation.
Pour survivre, des mesures d’austérité avaient été prises à tous les niveaux : compressions du personnel, réduction de charges, suppression d’activités… La presse, notamment, la presse écrite, vivait avec le minimum, mais continuait à remplir son rôle.
En plus de faibles recettes tirées de la vente des journaux, elle pouvait profiter de la subvention annuelle de l’Etat et de quelques abonnements auprès du privé. Tant bien que mal, elle essaya d’être présente sur la scène.
Chaque fois que l’occasion se présentait, les journalistes lançaient des messages d’alerte en direction des Pouvoirs publics leur rappelant la nécessaire révision de l’Arrêté de l’IGE et soutenant « pas de démocratie sans une presse forte et indépendante ». C’est à cet appel que le gouvernement a réagi jeudi dernier en conseil de ministres.
Reste maintenant à savoir comment vont s’y prendre les Autorités ? Quelles mesures ont-elles prises pour contrôler les ordonnateurs des budgets publics dans leur gestion des chapitres de communication? Comment feront-elles pour que la publicité, les annonces et autres abonnements, soient offerts équitablement et objectivement aux supports médiatiques ?
N.H via cridem