«Montrer les salafistes tels qu’ils sont» | Mauriweb

«Montrer les salafistes tels qu’ils sont»

jeu, 10/03/2016 - 14:52

En France, le documentaire de François Margolin et Lemine Ould Salem a été interdit aux moins de 18 ans par le ministère de la Culture. Depuis, la sanction a été levée par le tribunal administratif mais la polémique se poursuit. «Le Temps» organise une projection unique, avec les deux réalisateurs, le 15 mars

Depuis sa sortie en France le 27 janvier, «Salafistes», le documentaire de François Margolin et Lemine Ould Salem, ne cesse de diviser médias et intellectuels. Et comme souvent avec les querelles d’experts, on finit par oublier ce pour quoi on s’étripe. En l’occurrence un documentaire de 80 minutes qui montre comment, de la régulation des mœurs (police des femmes voilées, charia appliquée aux voleurs, coups de fouet aux buveurs) à la lutte pour son expansion géopolitique, le salafisme, doctrine de l’Islam qui prône un retour au Prophète, s’impose comme un système totalitaire, et le revendique comme modèle universel. Un jeune imam le dit clairement: «L’Occident a tout expérimenté toutes les religions, le christianisme, le communisme, le socialisme, la laïcité, et tout a échoué sur le plan social, économique et sécuritaire. Il n’y a pas d’alternative à part l’Islam.»

Le film est construit à partir de trois types d’images: celles tournées par le journaliste mauritanien Lemine Ould Salem à Tombouctou et Gao, deux villes soumises à la loi islamique. Ces rushes ont inspiré le film «Timbuktu» de Abderrahmane Sissako, récompensé par sept Césars. Le second matériau est constitué d’entretiens avec des cheikhs, des imams et des chefs militaires, djihadistes ou quiétistes, qui vantent les bienfaits de la charia, justifient l’inégalité hommes/femmes et expliquent en quoi l’homosexualité mérite d’être condamnée, tout ça sur fond de haine de l’Occident. Ce sont des images à valeur d’archives, des images encore jamais vues. Enfin, troisième matériau, les vidéos de propagande de l’État islamique, utilisées en contre-point de leur discours.

«Le Temps», en collaboration avec le cinéma Empire à Genève, offre à ses lecteurs une projection unique de ce film considéré comme un chef-d’oeuvre par Claude Lanzmann («Shoah»). Elle aura lieu le 15 mars, en présence des deux réalisateurs. En attendant, c’est François Margolin qui répond aux questions.

 

Le Temps: L’interdiction au nom «de la protection de la jeunesse» décidée par Fleur Pellerin a été levée par le juge des référés. Vous voilà soulagé?

François Margolin: Oui, car ce n’est plus une sanction infamante – l’interdiction au moins de 18 ans étant réservée aux films pornographiques –, en revanche, elle reste clairement politique. En cette période d’état d’urgence, le gouvernement français n’arrive pas à parler normalement de l’islam et des musulmans, comme si l’islam était une religion à part. On nous a reproché d’être le porte-voix de la propagande djihadiste, alors que c’est exactement le contraire. On nous a reproché de ne pas avoir filmé les victimes, les dissidents ou les opposants, ce qui est faux. Le juge des référés a démonté un par un tous les arguments du ministère de la culture. C’est une claque politique envers une décision qui relevait d’une censure quasiment soviétique et d’une véritable tartufferie.

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