Face à la montée de la colère des citoyens menacés de voir leurs habitations détruites, le gouvernement mauritanien a décidé de revoir sa politique de gestion foncière dans la capitale. Si cette décision est saluée par certains comme une preuve d'écoute envers la population, elle soulève de sérieuses interrogations sur la capacité de l'État à appliquer son Schéma Directeur d'Aménagement et d'Urbanisme (SDAU), destiné à moderniser Nouakchott.
Un compromis sous pression
Lors d'une récente déclaration, le ministre des Affaires foncières et du Patrimoine de l’État, Mokhtar Ould Bousseif, a annoncé l’adoption d’un plan de régularisation des quartiers concernés par les démolitions prévues. Initialement, trois zones de la capitale étaient ciblées pour occupation illégale de terres publiques. Cependant, face aux protestations des habitants affirmant détenir des documents de propriété et avoir payé des sommes importantes pour ces parcelles, le gouvernement a suspendu les démolitions.
Le ministre a précisé que les preuves présentées par les occupants ne justifiaient pas légalement leur possession des terrains. Cependant, pour éviter une crise sociale, il a été décidé de régulariser leur situation moyennant le paiement de sommes supérieures aux tarifs habituels du trésor public, à titre de sanction.
Une gestion foncière contestée
Si cette initiative peut être perçue comme humaine et pragmatique, elle envoie un signal ambigu. La fermeté initialement affichée risque d'être interprétée comme un aveu de faiblesse face à la pression populaire. Pire encore, la régularisation ex post de situations illégales pourrait inciter d’autres citoyens à occuper des terrains en espérant bénéficier du même traitement.
Nouakchott souffre depuis des décennies d’un urbanisme anarchique, marqué par des constructions informelles et une gestion foncière souvent contestée. L'application stricte du SDAU est essentielle pour transformer la capitale en une ville moderne, dotée d'infrastructures adéquates et respectant des normes urbanistiques durables.
Réformes et résistances
Le gouvernement semble décidé à lutter contre l’occupation illégale, notamment dans des secteurs sensibles comme Teyarett, Tevragh Zeina et les zones côtières. Une suspension des constructions dans ces zones a été annoncée, accompagnée d’un recensement complet et de nouvelles mesures de surveillance du foncier.
Par ailleurs, le ministre de l’Habitat a évoqué un projet de loi visant à modifier la législation sur l’urbanisme et la construction. Les responsabilités des ministères en charge de l’urbanisme et des domaines seront redéfinies pour mieux encadrer les opérations foncières.
Un avenir incertain pour l’urbanisme à Nouakchott
Pour garantir un développement harmonieux de la capitale, le gouvernement devra conjuguer justice sociale, respect des lois et dialogue constructif avec les citoyens. Une politique foncière fondée sur des principes clairs, appliqués avec transparence et fermeté, semble indispensable pour éviter que Nouakchott ne soit pris en otage par des pressions citoyennes ou des intérêts particuliers.
Le futur de Nouakchott dépendra de la capacité des autorités à maintenir un équilibre entre écoute et autorité, afin de bâtir une ville moderne, prospère et équitable.