Le Calame - Pour Mme Lalla Chérif, présidente du parti Sursaut, députée à l’Assemblée nationale, "le discours du président de la République à Ouadane est déterminant dans l'histoire moderne du pays". Entretien.
Le Calame : Le Parlement vient d’adopter le projet de budget initial 2022 d’un montant de 88,5 milliards MRU, soit une augmentation de 8, 5 milliards. Certains députés s’inquiètent de la manière dont ce budget sera exécuté. Partagez-vous leur crainte ?
Lalla Chérif : Je ne peux pas partager cet avis. Le budget 2022 accorde beaucoup d'importance aux dépenses sociales et aux programmes d'aide pour réaliser un décollage économique : allocation de 24 milliards MRU pour financer le soutien aux franges vulnérables et renforcer les capacités des secteurs de la santé et de l'éducation.
Six milliards ont été également alloués aux secteurs productifs et au soutien de la production locale, afin d’accélérer l’atteinte à l'autosuffisance alimentaire. Bien évidemment, cette politique s'accompagne de strictes mesures de contrôle qui rendent en conséquence ces craintes infondées.
- Avec la fondation, en 2020 par l’Assemblée nationale, de la Commission d’enquête parlementaire, le Parlement semble retrouver sa mission de contrôle des actions gouvernementales. Que pourrait-elle faire pour plus de rigueur dans la traçabilité des dépenses publiques ?
- Il est bien connu qu'en plus de son rôle législatif, le Parlement tient également, au sein de l’État, une fonction de contrôle de l’action gouvernementale, en plus des questions se rapportant à des sujets d’intérêt général. La plus importante a trait à la corruption sous ses diverses formes et multiples visages. C’est dans ce cadre que s’est inscrite la mise en place de la Commission d'enquête parlementaire, un organe sans précédent pour notre pays et qui s’est acquittée avec perfection et transparence de sa mission, avant de transmettre son rapport aux autorités habilitées. Cette nouveauté aura le privilège de dissuader à l’avenir tout celui qui nourrit l’intention d’abuser des potentialités du pays.
- Vous avez écouté, comme beaucoup de mauritaniens, le discours du président de la République à Ouadane et certainement pris part au meeting du 25 Décembre à Nouakchott. Que pensez-vous de ces manifestations ?
- Le discours du président de la République, à l'occasion du lancement du Festival des cités du Patrimoine, est déterminant dans l'histoire moderne du pays. Il a précisé sans ambiguïté que la Mauritanie est un État de droit, avec des institutions qui assurent à chacun son droit et, à tout celui qui détient un numéro national, abstraction faite de son origine ou autre, ses droits de citoyenneté et d'égalité, tout en exigeant de sa part les mêmes devoirs envers son pays. Il s’agit par conséquent d’un message d'une signification et d'une dimension profondes adressé à tous.
Le meeting du 25 Décembre est venu par ailleurs confirmer l'importance du renforcement de l'unité nationale et de la consolidation du tissu social national, en œuvrant à dissuader tous ceux qui surfent sur les vecteurs de la division et de l’atteinte à la dignité du citoyen ou de toute composante de la société mauritanienne authentique.
- Depuis des années déjà, on ne cesse de parler de l’unité nationale et de la cohésion sociale. Quelle est la position de Sursaut sur ces deux questions ? Le dialogue en gestation pourrait-il être l’occasion d’en débattre et d’y apporter des solutions consensuelles ?
- Au sein du Sursaut de la Jeunesse pour la Nation, nous considérons que progresser vers l'avenir requiert le renforcement de l'unité nationale et de la cohésion sociale, en transcendant les séquelles du passé et en apportant, aux questions pressantes, des réponses empreintes de responsabilité, conscience, honnêteté entre les générations et intégrité intellectuelle. Il faut trouver des solutions à tous les problèmes en suspens, au service de nos citoyens et par souci de leur accès durable à une vie décente ;en consacrant la jouissance de tous leurs droits, suivant une approche sociale, avec constamment à l’esprit les points douloureux dont certains ont souffert dans le passé et dont les survivances nécessitent encore une révision sérieuse, fondée sur l’égalité entière, afin de permettre aux groupes victimes du phénomène odieux de l'esclavage d'obtenir la plénitude de leurs droits.
Nous croyons, au parti, à l’impératif du travail consciencieux pour notre cohésion sociale et celle de tous nos acteurs, afin de renforcer la culture d'unité et d’explorer les perspectives politiques, économiques, sociales et géostratégiques du pays.
- Les mauritaniens se plaignent de la flambée continue des prix des denrées de première nécessité. Que pense Sursaut des mesures prises par le gouvernement pour endiguer ce fléau ?
- Comme on le sait et suite à la propagation du Covid-19, les marchés internationaux ont connu des turbulences qui ont eu un impact significatif sur les prix, en général, et les denrées alimentaires, en particulier. Les prix des produits de première nécessité ont ainsi connu une hausse notoire dans les marchés mauritaniens au cours de ces derniers mois.
Pour inverser cette tendance, le gouvernement a toutefois pris un ensemble de nouvelles mesures, mettant en place un mécanisme chargé du contrôle des prix des denrées essentielles telles que le blé, le riz, l'huile, le sucre ou les produits laitiers. Ce mécanisme permettra de contrôler et d’uniformiser les prix des matières de base, tout en surveillant leur commercialisation.
- Comment évaluez-vous le bilan du président Ghazwani à mi-parcours de son mandat ?
- Après son arrivée au pouvoir, en tant que président élu, Mohamed ould Cheikh Ghazwani s'est rendu compte du besoin pressant du pays en nouveau programme politique, économique et social, caractérisé par un nouveau mode de gouvernance et ouvrant ainsi à de nouveaux espoirs. Il ne fait l’objet d’aucun doute que la situation économique de l'époque nécessitait une nouvelle vision mettant de l’ordre dans l’échelle des priorités.
Sur le plan politique, le Président a commencé à normaliser la scène et à s'ouvrir à tout son éventail, instaurant un climat de concertation et de gestion commune qui ont contribué à enraciner le processus démocratique et à préparer également un terrain propice au take-off économique, dans un contexte exceptionnel consécutif à la propagation du Covid-19. Une commission commune entre la Majorité et l’Opposition a été formée sur le sujet, suivie d’une autre chargée de surveiller le Fonds spécial de solidarité sociale et de lutte contre le coronavirus, au sein de laquelle l’opposition a été confortablement représentée.
Au plan économique, on cite surtout et à titre non-exhaustif le renforcement du rôle du secteur privé, à travers l’amélioration du climat des affaires, le développement de partenariats entre les secteurs public et privé, l’amélioration de l'accès des Petites et Moyennes Entreprises (PME) aux financements et l’encouragement des investissements étrangers directs.
En vue d’une croissance durable et porteuse d'opportunités d'emplois, le président de la République a défini, le 31 Mars à imbedra, une nouvelle politique de développement et de valorisation de l’élevage. Alors que l'Office National de Recherche et de Développement de l’Élevage assurera la préservation du cheptel en quantité et en qualité, la Mauritanienne des Produits de l’Élevage s’attèlera à impliquer le secteur privé dans la valorisation des produits du secteur. Cette nouvelle vision rapprochera les éleveurs du marché et de ses outils pour développer des chaînes de valeur.
Il en va de même pour le secteur agricole qui stagnait depuis longtemps, faute d'une vision unifiée générant le consensus nécessaire pour développer les grandes surfaces de terres arables disponibles dans le pays. Le secteur fut longtemps le maillon faible de l'économie nationale et le gouvernement a ouvert, avec sa décision du 23 Juin 2021, des horizons nouveaux et uniques aussi pour ce secteur. Le renforcement des partenariats gagnant-gagnant, notamment entre l’État, les autochtones et les investisseurs privés, permettra au pays de se libérer de sa lourde dépendance vis-à-vis des produits alimentaires et de mettre fin à la négligence imposée à la terre dont l'économie a besoin pour être dynamique, croître et offrir des opportunités d’emploi. Avec cette nouvelle politique et sa mise en œuvre dans une atmosphère de consensus, l'État dispose d'un outil unique pour réaliser une croissance forte et durable.
Dans cette dynamique, le secteur privé est appelé à jouer un rôle important comme moteur de croissance et comme facteur de valorisation de notre potentiel et de nos ressources naturelles, notamment dans les secteurs de l'agriculture, de l'élevage et de la pêche. Le développement des PME et le recours aux partenariats public-privé constituent également l'un des fondements de la nouvelle approche de développement de notre tissu économique. En somme, il s’agit d’un bon et honorable bilan, avec des espoirs de plus en plus grands pour davantage de développement et de progrès, sous la direction et l'approche de Son Excellence le président de la République, monsieur Mohamed ould Cheikh Ghazwani.
- Comment se porte Sursaut aujourd’hui ? Quelle place occupe-t-il au sein de la majorité présidentielle ?
- Comme chacun le sait, le Mouvement du sursaut de la jeunesse pour la Nation, est un des partis de la majorité présidentielle. Représenté au Parlement, il a adopté le programme de Mohamed Cheikh Ghazwani dès l’annonce de sa candidature et accompagne ses gouvernements dans la mise en œuvre de son projet de société. Jeune de nature, Sursaut connaît une dynamique particulière et imbue d'une disponibilité constante à traiter les grands enjeux nationaux. Ceci dit, nous restons attachés à sa présence dans les masses sur l'ensemble du territoire national.
Propos recueillis par Dalay Lam