Il y a un an, jour pour jour, le président Mohamed Ould Abdelaziz lançait un appel au Dialogue à Chinguitty. Un an plus tard, on en est encore à la case-départ. Il n’y a jamais eu dialogue et la perspective du départ du président dont c’est –normalement- le second et dernier mandat occupe plus la Majorité qui tente de se redéployer selon les alliances qui rapportent plus au sein du sérail plutôt qu’à contribuer à sortir le pays de l’impasse politique dangereuse.
C’est dans cette cacophonie qui donne raison au plus sceptique des partis d’Opposition, le RFD, sur le « sérieux » de cette proposition de dialogue que le président Ould Abdelaziz aurait demandé à ses principaux leviers (Primature, SG de la présidence et Upr) de «réactiver » sa proposition de dialogue à laquelle peu de gens continuent encore de croire.
Une bipolarisation dangereuse
En effet, les observateurs estiment que le président Aziz acculé par la situation économique et sécuritaire tente encore de gagner du temps ou plutôt d’en faire perdre à ses détracteurs politiques en leur faisant miroiter un dialogue qui va les occuper encore quelques temps. Cette analyse est corroborée par la stagnation du dialogue depuis l’appel de Chinguitty voilà une année maintenant. D’une « promesse » de dialogue résultant d’un « principe» de recherche d’un dialogue «inclusif et sérieux» on en est encore à patiner dans des «préliminaires », «des échanges verbaux» et «des contacts» qui font ressortir le manque de confiance entre protagonistes politiques et surtout le désarroi propre du régime qui ne sait pas où le mènerait un dialogue sérieux avec ses opposants dont les plus tonitruants semblent être les frères musulmans du parti « Tawassoul».
Un parti qui fait, par la récupération, des dégâts énormes de visibilité pour le régime qui a pourtant tout fait pour les isoler et leur couper l’herbe sous les pieds en accédant à leurs moindres caprices écartant même au lendemain des attentats de « Charlie Hebdo » une certaine idée de la laïcité de l’Etat. Mais peine perdue! Tout le monde y compris les diplomaties occidentales ressentent les effets pervers de la menace islamiste à chaque nouvelle polémique. L’incinération du Saint Coran, le crime de blasphème, et plus récemment la fermeture de certaines « Mahadras » prouvent que le torchon brûle surtout –pour le régime- avec les islamistes. Ceux-ci malgré leurs statistiques électorales faibles mobilisent bien sur des sujets aussi sensibles que ceux de la religion. Ils se sont surtout révélés de parfaits stratèges politiques par leur pragmatisme -opportunisme diront d’autres- politique. C’est ainsi que sans renier leur opposition, ils ont su bien jouer leur partition en tirant leur épingle du jeu par leur participation aux dernières législatives devenant en l’absence des autres partis d’Opposition, la seule force politique de l’Opposition qui compte dans l’hémicycle. Leader de l’institution de l’Opposition. De quoi donner du fil à retordre au régime en place. Quoiqu’on dise, ce dernier semble paradoxalement le plus grand perdant en ayant favorisé, par son intransigeance vis-à-vis de l’Opposition traditionnelle, son face-à-face avec les islamistes.
La situation économique aidant, pour lui comme pour la grande muette, «le véritable danger » viendrait de cette nébuleuse. Le «péril islamiste», loin d’être jugulé, est toujours en la demeure et parfois même bien camouflé dans les arcanes du Pouvoir. L’idée désobligerait aussi les partenaires occidentaux ; obsédés par la catastrophe d’un changement inattendu qui ferait basculer le pays sous l’empire des frères musulmans au Maghreb, berceau du « Printemps arabe ». C’est dans cette optique qu’on accorde au président Aziz un engagement à «guerroyer » –par tous les moyens- cette mouvance dont les ramifications ne s’arrêtent pas aux frontières nationales.
Mercantilisme quant tu nous tiens!
Mais tout le microcosme national le sait. Le régime a pâti d’une gestion mercantiliste du pouvoir. Il a mauvaise presse. Et il continue de foncer tête baissée dans une gestion aux forceps des affaires publiques qui risque de lui coûter cher. Peut être même qu’il ne convainc plus les partenaires politiques et économiques de l’efficience de sa «guerre» du bout des lèvres contre les réseaux terroristes. L’économie aujourd’hui en lambeaux et l’insécurité grandissante dans le pays prouvent bien sa frilosité. Or, il n’y a pour ainsi dire que le dialogue pour exorciser le pire.
Malgré donc les schismes au sein du FNDU, et les perches tendues par certains de ses ténors franchissant parfois la ligne rouge pour l’aider à faire montre de plus de sagesse et de disponibilité à la concertation politique, le Pouvoir continue de tergiverser croyant qu’à miner la cohésion de l’Opposition, il en sortirait vainqueur. Pire illusion, en jouant de la sorte, non seulement le régime s’aliène les remparts à une implosion presque certaine avec l’ébullition sociale et économique vécue, mais il pourrait même accentuer auprès des partenaires du pays la perception de sa légèreté à prémunir une stabilité du pays à laquelle tout le monde appelle. 2015, toutes les parties s’étaient enivrées de cette promesse . Mais «il faut avoir une bonne mémoire pour être en mesure de tenir les promesses que l'on fait» disait F. Nietzsche
Jedna DEIDA