Une fois encore et comme d’habitude à l’occasion de chaque crise politique, l’incertitude, les interrogations, le scepticisme mais aussi et surtout une colère sourde et rampante envahissent les mauritaniens qu’ils soient alliés du pouvoir, qu’ils soient de l’opposition ou de la majorité silencieuse ; En cette période de pré-élection référendaire, les observateurs ont noté une certaine frilosité, des contradictions, de l’improvisation pour ne pas dire de l’amateurisme dans les actes posés par un pouvoir unilatéraliste dans ses entreprises et en fin de parcours. Le Président Aziz semble de plus en plus submergé par le poids de ses décisions improvisées et contradictoires ; Il se jette sur le sénat sans réfléchir, il souille les symboles de la république, il tripatouille la constitution , il lance des mesures coercitives et insupportables contre les pauvres transporteurs, il tyrannise les commerçants et hommes d’affaires par les taxes et les impôts et les spolie, il met en déliquescence l’administration par le choix de fonctionnaires véreux , incompétents et aux mœurs douteuses, il met à genoux l’économie nationale par l’improvisation de projets sans lendemains, il tue l’Education et la Santé, il crée des tensions et des conflits avec tous nos pays voisin et la liste est longue…..
Pire l’homme est soupçonné par la majorité des mauritaniens d’avoir amassé une fortune colossale sur le dos des pauvres contribuables. Divisé, hypocrite et incompétent son entourage le pousse inéluctablement vers la sortie honteuse qu’il n’aurait pas imaginé, lui l’homme fort, tenace, sans état d’âme et croyant tout tenir. C’est comme si sa propre majorité, agacée par ses comportements hautains et humiliants, envers elle préparait à son encontre une révolution de palais qui ne dirait pas son nom. Le vote des sénateurs contre les amendements constitutionnels, acte d’une haute signification démocratique, qui a constitué un réel bouleversement dans les habitudes de nos parlementaires, a été géré avec tellement de maladresse, que cela a mis a nu davantage les limites, l’incohérence du pouvoir et son inculture démocratique.
L’opportunisme d’une élite minoritaire qui se traduit par une volonté insensée et incompréhensible de justifier quoique vaille l’usage de l’article 38 , par l’organisation de « moubadarats » burlesques, confortent les mauritaniens une énième fois sur la médiocrité de leurs gouvernants et du système Aziz..Il est temps que les acteurs du système qui se partagent la responsabilité de cette situation reviennent à la raison et à un esprit lucide et responsable. La question n’est pas nécessairement d’être pour ou contre le pouvoir en place. Il s’agit plus simplement de mettre en avant l’intérêt suprême de la nation, de s’oublier et de faire passer au second plan les intérêts personnels ou de clan face à la prise des grandes décisions qui déterminent le présent et l’avenir de tout un peuple. Quoi qu’il en soit nous devons tous être conscients que dans une atmosphère politique délétère comme celle que nous vivons actuellement , salie par les affaires et les suspicions, marquée par une crise de confiance entre tous les acteurs politiques, tendue par une crise économique et sociale et de plus en plus de soulèvements des masses populaires brisées et brimées, une sourde insoumission qui ne dit pas son nom dans la majorité présidentielle , tous les leviers du développement se grippent ; Les réalisations se dissipent et sont vite oubliées quelle que soit la force de propagande qui les entoure, l’Education et la Culture se meurent, les maladies et l’ignorance déciment les populations, les projets sont ralentis, les acquis ne sont point pérennes, les succès d’un jour deviennent des échecs le lendemain, les urgences sont permanentes, les prix montent, les denrées se raréfient, le pouvoir d’achat baisse, le niveau de vie aussi, la pauvreté s’installe, le pays s’endette davantage, la cohésion et l’unité nationales sont menacées, le fossé entre riches et pauvres se creuse, l’incertitude et le désespoir étranglent les citoyens, la persistance des crises et des impasses politiques créent des boulevards d’incertitudes et de dangers qui menacent la paix et la stabilité du pays. Mais il faut aller chercher la source de cette situation bien plus loin que dans l’exercice normal de la démocratie au quotidien dans un pays normal. En Mauritanie la démocratie est née avec des tares congénitales qui l’ont réduite à un outil que certains puissants groupes de pression manipulent, selon leur appartenance sociale, idéologique, corporative…..
Le rêve de jouir d’une réelle démocratie avec ses élections libres et démocratiques, ses contrepouvoirs, ses institutions indépendantes, impartiales et compétentes , un système où chaque citoyen recouvre ses droits et de ses libertés, s’est heurté à des phénomènes qui se sont au fil du temps interpénétrés et renforcés mutuellement ; D’abord la chappe de plomb constituée par l’immixtion de l’armée dans la gestion politique du pays, ensuite l’emprise des leaders féodaux et religieux réfractaires aux changements et l’oligarchie des hommes d’affaires sans état d’âme et obnubilés par le profit, sur une population électorale, démunie, peu instruite et vulnérable, le retard de la prise de conscience de l’élite et de la classe moyenne dans le rôle qu’elles doivent jouer dans notre système démocratique, le manque de compétences et de crédibilité de nos institutions républicaines, la réduction du potentiel contestataire vis-à-vis du pouvoir à quelques leaders et partis politiques sans représentation significative élargie sur toute l’étendue du territoire et enfin l’absence de réels contrepouvoirs et de régulateurs compétents de la vie politique. Quant aux institutions républicaines elles n’arrivent pas à jouer leur rôle ; D’assujetties elles ont évolué vers un état amorphe qui a induit leur déphasage par rapport aux exigences de l’heure. Le Conseil Constitutionnel n’est visible que pendant les élections pour en avaliser les résultats sans discernement, le Conseil économique et social est un gros machin inerte, le médiateur de la République est en chômage déguisé, les deux chambres et plus particulièrement l’Assemblée Nationale ne font qu’applaudir et enregistrer les actes de l’Exécutif, les média publics continuent de plus belle à jouer aux laudateurs du régime en place, transgressant la loi, leur statut et leurs cahiers des charges, les régulateurs (HAPA, Are, Commissions des marchés ne font pas de vagues, l’IGE et la Cour des Comptes sont orientées par le pouvoir….
Et ne s’attaquent point aux grosses pointures). La démocratie mauritanienne continue sa crise d’adolescence. Elle n’arrive pas à se départir de son état d’ersatz malgré les percées observées dans le domaine des libertés d’expression et d’association acquises depuis les réformes engagées pendant la période de transition entre 2005 et 2006. Et même ces dernières sont fragilisées et exposées au pire par l’usage qu’en font les acteurs ; Un sursaut national de tous les patriotes est nécessaire pour créer les conditions pacifiques et démocratiques de changement profonds dans notre système de gouvernance politique pour qu’au-delà de 2019 la Mauritanie vive une ère nouvelle de son histoire ou règnent réellement la paix, la stabilité, la démocratie, le pluralisme, l’égalité, la transparence, la probité, loin des turpitudes et des entreprises hasardeuses et fatales à la survie de notre chère nation.
Abou Moussa