Les assises du dialogue national inclusif ont été closes jeudi 20 octobre 2016 au palais des Congrès. Une cérémonie de signature du document contenant les conclusions de ce dialogue a été organisée. Plusieurs personnalités de la majorité et de l’opposition participante sont intervenues. Puis enfin, c’est au tour du président Mohamed Ould Abdel Aziz de prendre la parole en Hassanya pour apporter certains éclaircissements très attendus par tous les Mauritaniens. Dans son intervention, Ould Abdel Aziz a essentiellement repris les accords entre la majorité et une partie de l’opposition , notamment la dissolution du Sénat, l’organisation d’un référendum avant la fin de 2016, la révision des modalités de fonctionnement de la commission électorale nationale indépendante et l’imminence d’élections municipales et législatives anticipées entre autres importantes conclusions du dialogue national inclusif. Le président Ould Abdel Aziz a clairement déclaré publiquement qu’il respecterait la constitution qui ne lui permet plus de se représenter. Mais il a tenu néanmoins à rappeler à toutes fins utiles qu’il n’éprouve aucune gêne et n’a aucune peur de tripatouiller la loi fondamentale voire de la changer. En rappelant qu’il l’a déjà suspendue à travers des coups d’état. Selon Ould Abdel Aziz, le changement de l’article 26 de la constitution relatif à la limitation de l’âge des candidats à la présidence profite à plus de 30 mille Mauritaniens, celui de l’article 28 relatif au nombre de mandats ne profite qu’à lui. Seulement, poursuit-il, il n’est pas normal que l’intérêt égoïste prenne le pas sur l’intérêt général et sur la consolidation de la démocratie. Dans une allusion à peine voilée au président de l’APP, Ould Abdel Aziz critique ceux qui veulent à tout prix réviser les textes constitutionnels pour en profiter individuellement. Maintenant, selon Ould Abdel Aziz que la soupe est prête, elle est pour tout le monde : pour ceux qui ont participé à sa préparation, pour ceux qui ont arrêté en cours de chemin et pour ceux qui n’ont pas participé. Comme d’habitude, Ould Abdel Aziz n’a pas raté l’occasion de s’en prendre un peu à l’opposition radicale accusée d’être à l’origine de tous les maux du pays. Ould Abdel Aziz déclare que l’Etat et ses autorités ne permettront pas l’anarchie et séviront durement contre tous ceux qui seraient tentés de la promouvoir. Selon Aziz, tous les indicateurs et toutes les institutions internationales attestent que l’économie du pays va très bien. Sans dire que la dette extérieure nationale représente 93% du Produit intérieur brut ! Selon Ould Abdel Aziz, la question du troisième mandat est une affaire déclassée. Aux sénateurs mécontents de leur prochaine dissolution et leur remplacement par des conseils régionaux qui seraient plus proches des populations, Ould Abdel Aziz déclare que ni aucune personne ni aucun groupe de personnes ne peuvent prendre la Mauritanie en otage. La sortie de Mohamed Ould Abdel Aziz permettra forcément de redistribuer les cartes. La majorité et toute l’opposition vont devoir revoir leur stratégie par rapport à la nouvelle donne politique. Déjà, le parti Tawassoul s’est réuni en urgence. Le Forum National pou la Démocratie et l’Unité qui prévoit de faire une grande marche le 29 octobre contre le changement de la constitution a suivi avec attention la clôture des assises du dialogue national inclusif. Selon des sources proches de ce rassemblement, ses composantes organiseraient une réunion express pour étudier la conduite à tenir face à la nouvelle situation. Le Rassemblement des Forces Démocratiques dont le président revient d’un voyage des Etats Unis devrait aussi réagir par rapport aux derniers développements de la scène politique nationale. L’ultime deuxième mandat de Mohamed Ould Abdel Aziz finit en 2019. L’ancien général reconverti en démocrate a encore trois ans pour manœuvrer. Le renforcement de ses pouvoirs que prévoit l’une des clauses des amendements constitutionnels peut constituer une alternative machiavélique de trouver une formule qui puisse lui permettre de concilier entre le respect de la constitution et l’ambition de rester encore pour quelques temps au pouvoir au delà de 2019 à travers des manipulations constitutionnelles que des pouvoirs exagérément renforcés permettraient en toute légalité.
Le Calame