Le Calame - Grande Première à Nouakchott : la visite officielle d’un ministre russe des Affaires étrangères, le mercredi 8 Février 2023, après soixante années de discrètes relations diplomatiques entre la Mauritanie et la Russie.
De nombreux media relatent l’événement, notamment RFI et Saharamédias. La première relève les préoccupations du ministre russe envers la situation sécuritaire au Sahel « partagées, selon lui, par les deux pays » - un « selon lui » lourd de sous-entendus… – et « la crise » au Sahara occidental, en se contentant d’en rapporter les dires de Sergueï Lavrov évoquant pour sa part « l’enjeu de la régularisation de [cette] question, sur la base de la décision du Conseil de sécurité des Nations unies. »
Tout comme au sujet de la crise de l’approvisionnement alimentaire subie par l’Afrique – consécutivement à la guerre en Ukraine tient à préciser RFI – et dont « la responsabilité, selon lui, incombe aux sanctions illégales et illégitimes des États-Unis et de leurs satellites ».
De son côté, Saharamedias insiste plutôt sur les déclarations du ministre, « avec à ses côtés son homologue mauritanien Mohamed Salem ould Merzoug », en ce que la Russie « respecte les décisions de la direction mauritanienne et son rôle dans la résolution des crises dans le continent africain, notamment celles proches d’elle au Sahara et au Sahel. »
Et d’embrayer longuement sur les propos de Sergueï Lavrov quant à « l’intérêt particulier de son pays à développer l’aspect économique et commercial [de ses relations avec la Mauritanie] », au-delà des accords en cours dans le domaine de la pêche qu’il espère cependant « renforcer par de nouvelles conditions appropriées […] ».
En avant donc la diversification tous azimuts de nouveaux domaines de coopération : infrastructures de base, transfert de technologies et de compétences, valorisation des produits made in Mauritanie, exploitation des ressources souterraines, sécurité alimentaire et énergétique, médecine, culture, etc. ! Il reste à étudier en commun et « présenter des propositions en ce sens aux présidents des deux pays lors du sommet Afrique-Russie qui se tiendra cette année à Saint-Pétersbourg. »
Après son intervention au Mali et avant celle apparemment imminente au Burkina Faso, le moins donc qu’on puisse dire est que la Russie a entamé une politique dynamique en Afrique. Avec des arguments de poids, n’en déplaise à la sobriété acidulée des commentaires de RFI.
Si « la Mauritanie a la possibilité d’obtenir de la Russie des produits énergétiques et agricoles », fait à cet égard noter Sergueï Lavrov, « [il nous faut encore et toujours] encourager le secrétariat général des Nations unies à empêcher les obstacles illégaux imposés par l’Occident aux voies logistiques et les circuits financiers pour acheminer les denrées alimentaires vers les marchés mondiaux. »
L’Occident, plaie de l’Afrique et plus généralement de la planète ? Et le ministre russe d’enfoncer le clou en évoquant « la crise géopolitique provoquée par l’utilisation des États Unis d’Amérique du régime ukrainien afin de se débarrasser des obstacles à son hégémonie sur le Monde. »
Non pas certes que l’Afrique ait eu à se féliciter des précédentes manœuvres de l’Union soviétique durant la Guerre froide mais il n’en demeure pas moins que celles de l’Occident – notamment de la France… – depuis la chute du Mur de Berlin sont loin d’avoir convaincu les Africains. On suivra donc avec attention le sommet à Saint-Pétersbourg…
Ahmed ould Cheikh