Le Calame - Très appréciée des mélomanes, vous êtes une des artistes mauritaniennes en pleine ascension. Quel est votre secret ?
Noura Seymali : Je suis d’une famille griotte. J’ai donc grandi en fanfare. Mon père était professeur de musique. Depuis toute petite, j’ai entretenu le rêve de moderniser notre art et de le faire partager au monde entier.
- Quel genre pratique Noura ? De quels instruments joue-t-elle ?
- Genre « tradi-moderne » : j’ai modernisé la musique traditionnelle. Je joue de l’ardine et j’ai dans mon groupe guitare basse, batterie, guitare traditionnelle et Tidinit.
- L’art nourrit-il les artistes que vous êtes ? Bénéficiez-vous de droits d’auteur dans les media publics ?
-Dans notre pays, nous n’avons pas vraiment de structures en place pour distribuer des droits d’auteurs. Je les trouve ailleurs et nous travaillons aussi avec une maison de disques. Mes enfants ont leur choix et ne sont pas forcés à faire la musique mais nous soutenons bien sûr leurs ambitions musicales. « Ce n’est pas les gens qui choisissent la musique », dit-on, « c’est la musique qui choisit les gens ». Si eux aussi veulent la musique, pourquoi pas ?
- Quelle place réserve l’État à nos artistes ? Existe-t-il des espaces ou des centres de formation et d’accompagnement des musiciens ?
- Effectivement, il existe des espaces pour la musique en Mauritanie mais, moi, j’aimerais bien fonder une structure personnelle, notamment un nouveau centre pour la musique, et monter des projets pour valoriser celle-ci afin de la faire connaître partout davantage.
- Vous avez effectué des tournées à l’étranger. Quelle place occupe la musique mauritanienne dans le monde ? Est-elle en voie de se moderniser ?
- J’ai eu la chance de beaucoup voyager à travers le monde et d’assister à plusieurs festivals. Au cours de différentes manifestations, j’ai porté haut la musique mauritanienne, j’ai montré combien elle est riche, variée et compétitive, combien elle peut rivaliser avec les autres. Cela m’a permis de constater, lors de nos sorties, que beaucoup de gens s’intéressent à notre musique. Elle gagnerait à se faire connaître davantage, c’est là le rôle de nos artistes et nous y travaillons pour montrer ses différentes facettes, ses instruments traditionnels comme l’ardine, par exemple. Bref, nous nous employons beaucoup à rehausser la place de la musique mauritanienne dans le monde.
- Revenons un peu sur ce fameux mariage entre un artiste et une fille noble qui a suscité des réactions contrastées sur la Toile. Qu’en pensez-vous ?
- C’est un sujet qui a suscité de vifs débats, il y a quelques jours. Je suis contre les polémiques de ce genre. Moi qui vous parle, mon père était griot mais ma mère ne l’était pas. Cela dit, je suis pour des mariages entre les personnes de caste différente, donc entre les griots et ceux qui ne le sont pas. Cela ne me pose aucun problème.
- Que vous a inspiré le discours du président de la République à Ouadane qui condamne justement ces tares et entraves au développement de la société mauritanienne ?
- Je préfère ne pas entrer dans les discours politiques mauritaniens, ce n’est pas mon domaine. Je suis avec tout le monde.
Propos recueillis par Dalay Lam