La rapidité, pour ne pas dire la désinvolture, avec laquelle un journaliste a été condamné à un an de prison ferme et jeté au cachot rappelle, si besoin était, que notre combat pour une véritable liberté de presse a encore du chemin à parcourir.
Au moment où des affaires autrement plus importantes dorment dans les dédales du palais de Justice, un délit de presse tout ce qu'il y a de plus banal est jugé à la vitesse grand V. Certes le plaignant n'est pas n'importe qui.
Un patron des patrons, élevé ex nihilo (ou presque) par Ould Abdel Aziz qui fit la pluie et le beau temps pendant la dernière décennie et à qui l'on ne peut toujours rien refuser. Que reproche-t-il à Ould Lebatt ?
D'avoir dit qu'il a versé une importante somme d'argent à l'ex-Président. Quoi de plus normal ? C'est un secret de Polichinelle que les deux hommes étaient en affaire. Magnanime, il a fini par retirer sa plainte.
Au-delà de cette condamnation (un nouveau mauvais point pour le pays…), se pose le problème de la dépénalisation du délit de presse. Dans les pays de tradition démocratique, qui consacrent la liberté de celle-ci, la peine pour ce genre de délit est le paiement au plaignant d'une ouguiya (un euro ou un dollar) symbolique et la publication dans un journal à grand tirage de la sentence du juge.
Jusqu'à cette condamnation, on pensait que notre pays faisait de cette élite, après trente ans de liberté de presse. Hélas non, malheureusement. Encore et toujours un combat à mener. Jusqu'à quand, Seigneur du courage ?
Ahmed Ould Cheikh (Le Calame)