Même si l'ambition politique récemment exprimée par l'ex Premier ministre M. Sidi Mohamed Ould Boubakar, pour annoncer sa candidature à la magistrature suprême de la République, semble un peu tardive, son avènement survient, malgré tout, au bon moment.
Bien au delà des divergences d'opinions sur l’appréciation de l'héritage politique de ce grand commis de l'Etat, nul ne pourrait néanmoins, remettre en question la lucidité de son talent, la consistance de ses capacités managériales et la probité de son parcours de carrière. Quelle que soit par ailleurs, l'issue que lui réserveront les prochaines élections présidentielles, Ould Boubakar, constituera indéniablement une valeur ajoutée remarquable pour la scène politique nationale, eu égard à la pertinence de ses qualités humaines et professionnelles, notamment quand il aura décidé de continuer résolument son chemin.
A mon avis, ce dont la Mauritanie a besoin à l'heure actuelle, n’est ni un "leader éclairé", ni une sorte de monarque déguisé, ni un despote avéré, qui s'arroge de faire perpétuer un pouvoir qui est désormais, largement contesté.
Bien au contraire, le pays a besoin, quand bien même la simplicité devienne criante pour s'imposer, d'un excellent Chef d’équipe, ayant d’abord et avant tout, une moralité irréprochable, croyant profondément en son pays et en son peuple et, possédant à la fois, le savoir faire et l’expérience qui lui permettent de les servir avec humilité et sans faille.
D'autant plus, la personne qui présente le mieux ces caractéristiques, devrait être prédisposée à s’acquitter convenablement de son devoir, le plus honnêtement et fidèlement possible. Après quoi, elle devrait s’en aller tranquillement sans tort ni préjudice à la collectivité nationale et, de manière à lui permette de continuer, après ce départ, son cycle de vie normale.
Ce qui est impérieux pour la Mauritanie au stade actuel, c'est de construire des institutions républicaines fortes, avec un staff de personnel éclairé, dont le Chef de fil serait convaincu qu'il n'est pas, en fait, un "Sauveur providentiel" et, que sa mission qui est d'ailleurs, bien circonscrite dans le temps, se limiterait à servir son pays avec sérieux, intégrité et abnégation. Bref, un chef de fil qui a à l'esprit que le peuple va le juger précisément sur cette base d'appréciation, et non pas pour d'autres considérations.
Maintenant que la situation est telle que décrite, est-ce que le candidat M. Sidi Mohamed Ould Boubakar, pourrait-il être le Chef d'équipe approprié pour animer et impulser les chantiers impératifs de changement, pour mieux diriger le gouvernail du pays à l'issue des prochaines élections? Si tel est le cas, alors, les électeurs mauritaniens devraient-ils s'aménager pour consentir en lui l'investissement politique nécessaire, afin de renverser la vapeur et, changer la donne et les calculs de la tendance lourde? Enfin, le candidat serait-t-il, tout compte fait, digne de la confiance du peuple mauritanien pour le propulser à la magistrature suprême?
Voilà donc des questions fondamentales, qui nécessitent des réactions.
Quant-à-moi, je n'ai cessé, depuis quelques temps déjà, d'essayer de mettre en exergue le besoin extrême pour notre pays d'aller à la cherche d'un "vaisseau politique", ", "الفُلْك السيَّاسي", évoquant le symbolisme du fameux "Arche de Noé" et, son rôle sauveur de l'humanité lors du déluge cité dans le saint Coran. Il s'agit là d'appeler à l'éclosion d'un élan national pour initier un paradigme politique constitué d'un large front patriotique, prônant un vrai dialogue politique national, inclusif, pour inviter la refonte de la République sur des bases solides, tout en consacrant des règles de jeux claires et respectées par tous, afin de booster chez nous, l'exercice d'une démocratie véritable, investir dans le potentiel du vouloir vivre ensemble et, œuvrer inlassablement pour préserver la paix civile dans notre pays.
Par ailleurs, ce nouveau paradigme politique devrait transcender les nombreuses contradictions secondaires qui sont apparues durant les 20 dernières années, caractérisées par un bipolarisme politique aigu, souvent ravivé par le leg des antagonismes hérités aussi bien des deux côtés de la "Majorité" comme de "l’Opposition", telles que ces deux entités iconiques se sont forgé leurs statuts respectifs au cours du temps, tout en observant aujourd'hui leur porosité, leur relativité et leur limites intrinsèques, devenues pourtant évidentes pour tous, en particulier aux yeux du peuple mauritanien, sa jeunesse et ses forces sérieuses aspirant au changement.
Dans cet exercice, j'ai toujours développé que le nouveau paradigme politique souhaité, devrait promettre que son but ultime consiste à aider les Mauritaniens à œuvrer pour la réalisation d'un triple objectif, à savoir assurer la sécurité et la stabilité du pays, jeter les bases d'un véritable développement durable, tout en consolidant l'exercice de la démocratie pluraliste et son corollaire, la bonne gouvernance.
Aujourd’hui, avec la candidature à la présidence de M. Sidi Mohamed Ould Boubakar, une nouvelle lueur d’espoir se profile à l'horizon, pour l'émergence d'une plate-forme appropriée pour accueillir le projet de paradigme politique susmentionné "الفُلْك السيَّاسي", ou "Arche de Noé" politique.
En effet, le candidat jouit de toute la latitude pour faciliter l’émergence d’un tel cadre politique national inclusif, pour tenter le salut de la Mauritanie face aux tactiques politiciennes confuses, qui animent l’arène politique actuellement. En particulier, la tentation de brûler des goulots de sauvetage pour reproduire , à tout prix, un système politique devenu naguère indésirable à une large échelle populaire, pousser le pays vers un nihilisme politique qui le mènera dans les méandres de l’inconnu, ou encore plus grave, endosser le risque de s’engager dans l’agenda des conflits inavouables entre certains pays du Golfe arabe, aux risques et périls d'importer en Mauritanie leur rivalité récurrente.
Face à une telle situation périlleuse, il ne fait aucun doute que le candidat M. Sidi Mohamed Ould Boubakar, pourrait bien atteindre ses objectifs politiques en investissant pour son propre compte, dans l'impressionnant capital de frustrations cumulées durant la décennie écoulée. Son arme redoutable en la matière, consisterait à bouleverser les pendules, notamment pour transformer les points faibles en points forts, afin d'y rebondir pour remonter le boulevard vers la magistrature suprême. Sur son chemin, il saura certainement comment être attentif, réceptif et réactif pour pouvoir capitaliser tous les retournements, les surprises de parcours et les fluctuations des positions afin de gérer à son avantage le potentiel des alliances politiques et, des scenarios plausibles entre les différents acteurs de l’arène politique nationale et internationale.
Bien évidemment, s'ajoute à cet actif, l’opportunité d'exploiter rationnellement par le candidat, les larges espoirs qui animent la majorité des citoyens mauritaniens, indépendamment de leurs clivages classiques, dans leur aspiration commune à un avenir meilleur aussi bien pour le pays que pour ses populations. A cet effet, tous les espoirs sont donc permis pour qu'en fin de compte, la Mauritanie parvienne à voir la lumière au bout du tunnel. Cet espoir trouve sa quintessence dans le cadre d’un projet réel, de promotion de l’État et de la société, conjugué à une volonté politique rompue pour extirper la nation des abords de l'abîme, auquel elle est confrontée actuellement.
Cela étant dit par rapport au contexte général de l’événement de la candidature de M. Sidi Mohamed Ould Boubakar, il serait maintenant judicieux de revenir sur le contenu du discours politique prononcé par le candidat à l'occasion de la déclaration solennelle de sa candidature. L'aisance avec la quelle le candidat s'est acquitté de cet exercice oral, lui a permis de tenir des propos forts, sincères, confiants, inclusifs et généreux. En effet, celui-ci avait exprimé clairement les contours de son orientation politique et de ses positions.
Désormais, la classification du candidat ne laisse plus de doute. Il sera vraisemblablement, le concurrent le plus puissant face au candidat du régime, le général Mohamed Ould El-Ghazouani. Ainsi donc, l'ambition politique du candidat Sidi Mohamed Ould Boubakar serait venue à point nommé. Elle constitue une nouvelle dynamique salutaire pour l'émergence d'un acte politique civil non conventionnel, qui serait providentiel pour la scène politique. Un acte fondateur sur lequel une large opinion publique nationale, peut désormais compter et parier.
Nonobstant ces signes positifs très forts, j'estime qu'il n'est plus politiquement acceptable, notamment après toutes les expériences antérieures frustrantes, d'être rassuré, afin de s'engager résolument pour la réussite d'un candidat, par une simple promesse de sa part, fut-il encore M. Sidi Mohamed Ould Boubakar, dont je ne doute aucunement qu'il est digne de confiance et, qu'il apporte une valeur ajoutée majeure à la scène politique nationale. Toutefois, le bon usage qu'il apporte pour contribuer à assoir des traditions de bonnes pratiques politiques, est louable. En effet, en passant des accords préalables entre le candidat et ses partenaires politiques, qui déterminent les grandes lignes du contenu des réformes attendues, le candidat se porte garant d'une volonté et d'un engagement partagés afin d'œuvrer ensemble pour la réalisation du trio sécurité/stabilité, développement durable et consolidation de la démocratie en Mauritanie, conformément à des procédures appropriées, avec un calendrier clair de mise en œuvre.
En fait, le problème résiduel chez les Mauritaniens - qui se retrouvent actuellement aux portes de la prochaine élection présidentielle - est leur faible pour s'accaparer le pouvoir, et non pas le gérer. Le danger réside dans une sorte de mentalité rétrograde, qui perçoive toujours la politique comme une opportunité pour se partager les privilèges et le butin. C'est pourquoi, il est temps que l'élection de tout candidat à la présidence doit cesser d'être considérée comme un chèque en blanc qui lui est donné. Désormais, il serait nécessaire que les électeurs mauritaniens inaugurent une nouvelle ère qui astreint aux porteurs d'ambitions politiques majeures, l'obligation de rendre compte de leur mandat aux citoyens.
Dans cette perspective, le candidat Sidi Mohamed Ould Boubakar, pourrait avoir une inédite occasion historique qui, d'ailleurs, n'est pas offerte aux autres candidats, puisqu'il sera vraisemblablement, le concurrent le plus puissant face au candidat du régime. Certes, il s'agit d'un avantage comparatif stratégique majeur, dont il revient au candidat d'en tirer profit au maximum. C'est pourquoi, la dynamique de la candidature de Sidi Mohamed Ould Boubakar, gagnerait davantage en terme de crédibilité, au fur et mesure qu'elle aille à la rencontre du projet de "vaisseau politique", "الفُلْك سيَّاسي"ou "Arche de Noé". Un paradigme politique susceptible de générer une énième république réconciliée, bâtie sur un socle solide, relancer une véritable démocratie, tout en investissant dans un projet de société épanouie, forte du désir commun de ses citoyens pour entretenir le vouloir vivre ensemble et, de préserver la paix civile.
C'est pourquoi, je pense qu'une telle ambition politique, avec de tels aspirations salutaires pour notre pays, n'est jamais retardataire. Elle serait incontestablement, une contribution majeure dans le cadre d'un élan national sérieux de réflexion et d'action, désireux de baliser les contours d'une feuille de route pacifique pour redonner espoir aux échéances présidentielles de 2019, à travers une tonalité politique civile. Une espérance qui ne trompe point.
Mohamed Saleck Ould Brahim
Nouakchott, le 7 Avril 2019