Lors d’une récente conférence de presse tenue au siège de l’Union Nationale des Employeurs de Mauritanie (UNPM), le président Mohamed Zine El Abidine Ould Cheikh Ahmed a tenu des propos qui suscitent du scepticisme. Il a affirmé que l'UNPM travaille main dans la main avec le gouvernement pour mettre en œuvre le programme du Président de la République, particulièrement en ce qui concerne l’agriculture, le développement de l’élevage, et les énergies renouvelables. Pourtant, cette déclaration, qui se veut rassurante, mérite d'être examinée de plus près.
Le président de l'UNPM a souligné la réorganisation ministérielle récente, vantant l’importance de la fusion des ministères de l’Économie et des Finances et la création de nouveaux portefeuilles comme celui de la Jeunesse, des Sports et du Service Civil.
Les réelles implications de ces changements structurels sur l'économie et la vie des Mauritaniens sont encore à prouver.
Ould Cheikh Ahmed a également mis en avant la coopération entre le secteur public et le privé, mentionnant des projets en cours et réalisés. Toutefois, une analyse critique montre que cette coopération, bien que louable en théorie, ne bénéficie souvent qu’à une minorité d’entreprises déjà bien établies, laissant les petites et moyennes entreprises (PME) et les start-ups en marge du développement économique.
Le président a présenté des chiffres flatteurs sur les revenus du trésor public provenant des douanes et des impôts du secteur privé, ainsi que sur les progrès dans les domaines de l'agriculture et de la pêche. Cependant, ces chiffres ne reflètent pas toujours la réalité quotidienne des Mauritaniens. Par exemple, les avancées dans la production de riz et de légumes sont en partie dues aux subventions gouvernementales, mais ces aides ne sont pas toujours équitables et accessibles à tous les agriculteurs.
En ce qui concerne la modernisation du secteur de la pêche et les efforts pour améliorer les élevages, « Les succès évoqués doivent être nuancés par les défis persistants tels que la surpêche, la mauvaise gestion des ressources et la faiblesse des infrastructures de transformation et de commercialisation. Les emplois créés, bien que nombreux sur le papier, sont souvent précaires et mal rémunérés.
Le président de l'UNPM a également évoqué l'augmentation du nombre de Mauritaniens possédant des comptes bancaires, passant de 11 % à 25 %. Pourtant, l’accès au crédit et aux services financiers reste limité pour une grande partie de la population, notamment les agriculteurs et les petits entrepreneurs qui sont pourtant essentiels pour un développement économique inclusif.
Lors de la conférence de presse, les questions des journalistes ont abordé des sujets épineux comme la hausse des prix, les pratiques des banques qui privilégient les grandes entreprises au détriment des petits clients, et la prolifération de produits contrefaits ou périmés. Ces critiques mettent en lumière des problèmes structurels qui nécessitent des réformes profondes et une meilleure régulation.
Dans leur compréhension et analyse du discours d'investiture du Président Ghazouani, l'UNPM a passé sous silence l'important volet de la lutte contre la corruption. Ce silence est d'autant plus préoccupant que la corruption reste un obstacle majeur au développement économique et à la justice sociale en Mauritanie. L'absence de mention de cette priorité dans les déclarations de l'UNPM soulève des questions sur leur engagement réel à soutenir des réformes essentielles pour une gouvernance transparente et efficace.
La déclaration du président de l'Union Nationale des Employeurs de Mauritanie reflète une vision optimiste des progrès réalisés sous l’administration actuelle. Toutefois, il est crucial de ne pas se laisser emporter par cet optimisme sans prendre en compte les défis persistants et les disparités qui subsistent dans la mise en œuvre des politiques publiques. Pour que les promesses faites aux Mauritaniens deviennent réalité, il faudra plus que des discours : des actions concrètes, inclusives et transparentes sont indispensables. Sans une lutte efficace contre la corruption, les autres efforts risquent de rester vains.