Guinée/A. Condé :  De démocratiquement élu, à président à vie  | Mauriweb

Guinée/A. Condé :  De démocratiquement élu, à président à vie 

mer, 10/07/2019 - 14:42

A 81 ans, l’opposant « historique » en Guinée tente encore de brûler la Constitution qui lui interdit de briguer un autre mandat. Le sinistre risque cependant de se propager à tout le pays.

Décidément, le pouvoir grise l’élite politique africaine. Certains leaders au crépuscule de leurs longues carrières n’hésitent pas à embarquer leurs pays dans des aventures qui risquent de les mettre à feu et à sang pour assouvir leur soif insatiable de pouvoir.

D’un président démocratiquement élu à président à vie
Le visage qu’offre le gouvernement guinéen n’honore pas le pays. Cela est d’autant plus incroyable que l’initiative vient d’un homme légitimé par un combat de plusieurs années pour l’avènement de la Démocratie dans son pays. C’est donc le chef de l’Etat sortant, Alpha Condé, ancien opposant, et qui après plusieurs mandats, ne veut plus lâcher les rênes du pouvoir dont il devrait être exclu en 2020. Il avait été élu en 2010 pour un premier mandat de 5 ans et réélu pour un second et dernier mandat constitutionnel en 2015. 
La Constitution du pays consacrant le principe d’alternance pacifique au pouvoir avait a été promulguée le 7 mai 2010 après celle de 1991 suspendue en 2008 par la junte militaire dirigée par Dadis Camara. Mais aujourd’hui, c’est une nouvelle « révolution contre la Constitution » que prône A. Condé. Il tente le tout pour le tout pour se maintenir aux commandes d’un pays ruiné par la corruption et l’affairisme quitte à créer de toutes pièces une nouvelle constitution à la mesure de son ambition démesurée.
Une décision combattue dans toutes les sphères politiques en Guinée y compris dans son propre camp où le ministre de la Justice, Cheick Sako, a jeté son tablier en contestation de la tentative de Condé de violer la Constitution du pays. « (… ) Compte tenu de ma position personnelle contre toute modification ou changement de la Constitution en vigueur, vous comprendrez que je ne puisse plus continuer à exercer la fonction de ministre de la justice. » avait notamment expliqué le ministre démissionnaire pour prendre ses distances du projet contesté d’A. Condé.
Par ailleurs et face à cette tentative de domestiquer les institutions en Guinée, un Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), avait été créé en avril pour s’opposer à un troisième mandat.

L’alibi référendaire
Malgré l’opposition d’une grande majorité de guinéens, le chef de l’Etat sortant continue sa course contre la montre. Sachant la contestation légale de son troisième mandat, Condé envisagerait de lancer un référendum pour «une nouvelle loi fondamentale ». 
Malgré les tentatives du RPG (parti de Condé) d’en présenter une formule liftée comme appât (réformes des institutions…) tout le monde se doute que le seul objectif de cette consultation dont les résultats pourraient être trafiqués est de lui ouvrir, à cet âge, un boulevard. Une nouvelle trouvaille de nos dictateurs pour donner un cachet légitime à leurs décisions contestables dans le fond. Regrettable de constater qu’à quelques mois de vie, le vieil opposant dont l’arrivée était synonyme d’espoir enfoncera son pays dans une déplorable situation politique.
Un projet que l’opposition en Guinée qualifie de «maléfique» parce que sa seule raison d’être est de créer les conditions d’une présidence à vie de l’ancien opposant. De quoi craindre qu’à l’image d’autres pays de la sous-région, la Guinée ne sombre encore dans une période trouble qui va l’exposer à tous les dangers d’instabilité.
JD