Deux ans et demi après la fin de leur dernier accord, Dakar et Nouakchott ont conclu cette semaine une nouvelle convention permettant aux pêcheurs sénégalais de travailler en Mauritanie.
Un nouvel accord de pêche a été signé lundi soir à Nouakchott – en marge du sommet de l'Union africaine (1er et 2 juillet) – entre les ministres sénégalais et mauritaniens de la Pêche, Oumar Guèye et Nani Ould Chrouga, responsables de la pêche au ministère. Avec ce nouvel accord d'une durée d'un an renouvelable, les pêcheurs sénégalais sont bénéficiaires de 400 licences pour capturer 50 000 tonnes de poissons pélagiques avec 400 pirogues, a précisé le responsable. Les espèces concernées par cet accord sont notamment les sardinelles, les chinchards, les ethmaloses et les anchois. La pêche est la première ressource du pays suivie du tourisme.
Rareté du poisson dans les eaux sénégalaises
Face à la rareté du poisson dans leurs eaux territoriales à cause notamment d'une surexploitation de la ressource, les pêcheurs sénégalais sont de plus en plus dépendants des pays voisins comme la Mauritanie et la Guinée-Bissau.
En effet, le pays est en train de perdre des revenus substantiels à cause des tonnes des captures illégales dans ses eaux par des chalutiers venus parfois d'aussi loin que la Corée du Sud, selon l'Overseas Development Institute (ODI), un groupe de réflexion britannique spécialisé dans le développement et porCausa, une organisation espagnole de journalisme d'investigation.
En 2012, la pêche illégale a représenté un manque à gagner de 300 millions de dollars (plus de 271 millions d'euros) pour le Sénégal, soit 2 % de son produit intérieur brut (PIB). L'opacité des accords de pêche entre gouvernements ouest-africains et leurs partenaires commerciaux est régulièrement pointée du doigt ainsi que les capacités limitées de patrouilles et les failles juridiques à l'arrivée de ce poisson en Europe contribuent à cette situation.
Pour obtenir des résultats rapidement, les deux gouvernements mauritaniens et sénégalais veulent donc renforcer leurs industries de transformation du poisson et les flottes de pêche autochtones, au lieu de vendre des droits de pêche à des opérateurs étrangers.
Le débarquement des captures des pêcheurs sénégalais dans les eaux mauritaniennes se fera d'abord en territoire mauritanien pour permettre aux autorités mauritaniennes de procéder à des contrôles avant leur acheminement au Sénégal, a indiqué Mamadou Goudiaby. Le Sénégal va verser à la Mauritanie 15 euros pour chaque tonne de poisson pêchée, dont 10 euros dus par les pêcheurs et 5 euros par l'État du Sénégal, selon le nouvel accord.
Un contexte tendu
Ce nouvel accord a été conclu après la mort le 29 janvier dernier d'un jeune pêcheur sénégalais tué par des garde-côtes mauritaniens dans les eaux territoriales mauritaniennes. Ils avaient tiré sur une pirogue transportant neuf pêcheurs sénégalais qui circulait dans leurs eaux territoriales mauritaniennes, non loin de la frontière entre les deux pays, tuant un des occupants de l'embarcation. Des manifestations avaient alors éclaté à Saint-Louis (nord) du Sénégal, près de la Mauritanie, pour protester contre ce meurtre et réclamer des licences de pêche à Nouakchott.
Des incidents entre gardes-côtes mauritaniens et pêcheurs artisanaux de Saint-Louis, souvent accusés de violer l'espace maritime mauritanien, ont été fréquents ces dernières années. La ville de Saint-Louis abrite en effet une importante communauté de pêcheurs qui traditionnellement exercent leurs activités en Mauritanie.
Le précédent accord de pêche qui liait Dakar à Nouakchott n'avait pas été renouvelé depuis janvier 2016 en raison du refus de la partie sénégalaise d'observer l'obligation de débarquement des prises en Mauritanie, prévue par une nouvelle réglementation mauritanienne. Les pêcheurs sénégalais sont confrontés à une raréfaction de la ressource halieutique dans leur pays due notamment à une surexploitation. Ils dépendent en partie des eaux poissonneuses de la Mauritanie voisine, selon des professionnels de la pêche.
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