La France se fourvoie-t-elle au Sahel ? | Mauriweb

La France se fourvoie-t-elle au Sahel ?

lun, 22/01/2018 - 16:52

Au lendemain de la réunion du lundi 15 janvier  à Paris des ministres de la défense et des chefs d’Etat major des armées des États membres du G5 Sahel (Mali, Tchad, Burkina Faso, Niger, Mauritanie) et la veille d’un autre sommet, tout aussi crucial  des pays contributeurs   prévu le 23 février à Bruxelles, officiellement « pour compléter les besoins financiers ». La mise en place du G5   n’avance pas assez vite au grand dam des populations confrontées à une insécurité qui va crescendo.

Malgré un trésor de guerre déjà assez conséquent certaines armées restent confortablement dans les starting-blocks. En effet,  l’Union européenne   s’est engagée pour 50 millions d’euros, 10 millions fournis par chacun des États membres du G5 eux-mêmes, les États-Unis ont promis 60 millions de dollars (48 millions d’euros) sous forme d’aide bilatérale,   l’Arabie saoudite et les Émirats Arabes Unis respectivement 100 et 30 millions d’euros et la Hollande 5 millions d’euros. On est donc à plus de 70% de l’évaluation haute des états membres. Et même Emanuel Macron commence à douter de l’engagement sincère de certains états du G5 Sahel il n’a pas manqué d’exprimer clairement son opinion à ce sujet  le 30 novembre dernier à Abidjan, estimant que la mise en place du G5-Sahel n’avançait « pas assez vite » et que « les terroristes » avaient « enregistré des victoires militaires et symboliques notamment au Niger ». La logique affichée par la France est celle du « donnant-donnant » : « plus d’engagement des acteurs du G5 contre plus de soutien international » a expliqué l’Élysée. Mais à y regarder de plus prés, on se demande pourquoi la communauté internationale fait preuve de tant d’empressement à l’endroit de pays très loin des standards internationaux en matière d’Etats de Droit.

En effet ces pays présentent un certains nombre de similitudes. Dans ces pays, l’opposition est bannie et certains de ses leaders jetés en prison, les manifestations sont interdites ou sévèrement encadrées, la presse est muselée et l’entourage des présidents est omniprésent auprès de tous les leviers économiques et comble les premières dames de ces pays jouissent d’un pouvoir exorbitant en dehors de tout cadre constitutionnel ou réglementaire.

Ces pays sont l’exacte réplique de la République bananière installée en RD Congo par Joseph Kabila. Mêmes pratiques autoritaires, même engouement pour la répression violente des manifestations d’opposants, même délabrement de l’économie, même métastases de la corruption et de la mauvaise gouvernance et surtout même aversion aux processus démocratiques et en particulier les élections. Il n’y a pas meilleur moyens de faire prospérer la pensée et la pratique djihadistes que le déni démocratique que connaissent ces pays.

C’est dire qu’octroyer autant d’argent à de tels pays est affront à l’Afrique en général mais surtout aux pays qui font des efforts réels pour s’engager sur la voie de la démocratie pluralistes comme le Benin, le Cap Vert, le Ghana, le Sénégal etc.

 N’est ce pas là une prime à la mauvaise conduite ?

Rappelons que la force G5 Sahel se veut complémentaire de l’opération française Barkhane et de la Mission des Nations unies au Mali (Minusma), régulièrement prise pour cible par les groupes armés. Plus de 90 Casques bleus ont été tués dans des opérations violentes depuis 2013.

Douze mille casques bleus composent la Mission des Nations unies au Mali, tandis que la force française Barkhane compte 4 000 hommes dans la région.

Les pays du G5 Sahel avaient annoncé lundi 8 janvier à Bamako la création d’un fonds fiduciaire pour gérer l’aide promise à leur force conjointe anti-djihadiste.

B.C.