« Un procès éminemment politique », selon la défense | Mauriweb

« Un procès éminemment politique », selon la défense

ven, 14/07/2017 - 14:27

Le procès du sénateur Mohamed Ghadda s’est ouvert  jeudi à Rosso dans le sud du pays.

Jugé pour  homicide et blessures involontaires et  conduite d’un véhicule non assuré».  Le sénateur  est assisté de son avocat, Me Ahmed Salem Bouhoubeyni .  Celui-ci a déclaré que son client n’est pas poursuivi  pour un accident de la circulation dont les victimes n’ont pas porté plainte et ont été indemnisés, toutes choses qui excluent  habituellement toute poursuite dans les cas similaires. L’avocat a déploré la fréquence de ce genre d’accidents de la circulation qui est causé par le mauvais état des chaussées, la proximité  des commerces et habitations de la route et la divagation des animaux. Il a rappelé que le sénateur avait été arrêté en violation de son immunité parlementaire, soulignant que son arrestation est en porte à faux avec la pratique courante dans les tribunaux mauritaniens.  Il est donc clair, dit l’avocat que ce n’est pas l’auteur de l’accident qui est poursuivi mais bien le sénateur qui appartient à cette chambre parlementaire qui a rejeté la réforme constitutionnelle proposée par le pouvoir. Celui qui est arrêté aujourd’hui, a-t-il dit, c’est bel et bien le président de la commission parlementaire d’enquête sur les marchés publics, c’est aussi celui qui a requis une enquête sur «la vente» de Senoussi  et celui qui demandé que le président de la République fasse une déclaration de ses biens.  Nous sommes donc, a dit Me Bouhoubeyni, en face d’un procès politique. Contrairement aux déclarations du parquet, l’arrestation du sénateur est illégale et constitue une violation de l’article 50 de la Constitution qui stipule que «la détention ou la poursuite d’un membre du Parlement est suspendue si l’assemblée dont il fait partie le requiert ». La suspension de l’arrestation du sénateur, exigée par la chambre haute n’est pas circonscrite à  l’ouverture de la session, a-t-il martelé. L’avocat a déclaré que toute la procédure, y compris le procès,  peut suivre son cours  en l’absence du sénateur qui ne devait nullement être arrêté, si d’autres mobiles n’étaient  la raison réelle et profonde de son arrestation. L’ancien bâtonnier a poursuivi en disant que l’arrestation de M. Ghadda  constitue une grave obstruction à l’action parlementaire, soulignant que son client préside une commission d’enquête sur les marchés publics dont la mission englobe des questions sortant du cadre des sessions parlementaires. Cette commission, a-t-il précisé, est habilitée à convoquer et entendre tout membre du gouvernement  qui peut l’informer ou la doter de tout document relatif à l’enquête qu’elle mène.

Parlant des conditions de détention de son client, Me Bouhoubeyni a déclaré que le parquet est au courant des conditions inhumaines dans lesquelles celui-ci est détenu. Il a précisé que le parquet est au courant de la ‘’condamnation’’ des fenêtres des cellules de la prison de Rosso par une équipe de soudeurs dépêchée sur les lieux, ce qui représente un traitement inhumain infligé à un homme déjà largement éprouvé par une grève de la fin entamée depuis 5 jours. L’avocat a souligné que des pressions ont été exercées sur les familles des victimes pour qu’elles portent plainte alors qu’elles avaient déjà déclaré à la gendarmerie et devant un notaire qu’elles ne portaient pas plainte, position qu’elles continuent d’assumer.

Le procès actuel, a conclu l’avocat, est un procès éminemment politique alors que le vrai pari en Mauritanie, c’est la séparation des pouvoirs, c’est le prestige des institutions républicaines et la gouvernance au sein de l’Etat de droit.

Après avoir été libéré sur intervention du sénat, le sénateur Ghadda avait été arrêté vendredi à son domicile à Nouakchott et transféré dans une prison de Rosso.

Le 12 mai dernier, le sénateur, à bord de sa voiture, avait heurté trois personnes sur la route de Rosso, dont deux avaient malheureusement trouvé la mort.

Après l’accident, le sénateur avait été arrêté puis libéré sur demande du Sénat.

Mohamed Ould Ghadda préside la commission du Sénat qui enquête sur divers dossiers dont certains relatifs au nouvel Aéroport International de Nouakchott et à la SOMELEC.

Ely. Abdellah (ALM)