Le Sahel prisonnier de la corruption et de la mauvaise gouvernance | Mauriweb

Le Sahel prisonnier de la corruption et de la mauvaise gouvernance

dim, 03/07/2016 - 17:10

Un rapport de la commission parlementaire française des affaires étrangères, de la défense et des forces armées pointe du doigt la mauvaise gestion de l’Aide publique au développement (APD) allouée aux pays duSahel.

Présenté mercredi à la presse, ce document émet également des réserves concernant l’orientation globale et la répartition des fonds par secteurs d’activité. Les sénateurs Hélène Conway-Mouret et Henri de Raincourt, auteurs du texte, ont considéré que le bilan global de l’ADP dans la région du Sahel est«plus que décevant».

Ce qui s’explique, selon les deux rapporteurs, par «des facteurs bien identifiés.» Il s’agirait principalement de «la mauvaise gouvernance, le clientélisme et la corruption dans les pays aidés». 

Malgré l’importance des sommes annuelles versées par les bailleurs de fonds aux pays du Sahel (Burkina Faso, Tchad, Mali, Mauritanie, Niger et Sénégal), les résultats de cet effort d’aide au développement restent invisibles. Le rapport évoque comme signes d’échec de cette stratégie d’aide internationale : une croissance économique insuffisante, la non-maîtrise de l’accroissement démographique, un chômage généralisé chez les jeunes, une couverture sanitaire déficitaire, etc.

En marge de la présentation du rapport, Mme Conway-Mouret a réaffirmé que les résultats escomptés de l’APD n’ont toujours pas été atteints. Selon elle, bien qu’il y ait quelques «progrès réels», l’aide n’a pas «enclenché un processus global de développement, créateur de richesses et d’emplois». En effet, le texte du rapport fait le constat d’un «développement économique encore trop lent pour absorber la croissance démographique» dans l’ensemble des pays du Sahel. Cela est dû à«un manque de stratégie globale de développement».

Dans ce sens, M. de Raincourt regrette que «certains secteurs ont été un peu négligés. L’agriculture n’a pas eu la place qui lui revenait logiquement s’agissant d’un secteur qui est le premier employeur du Sahel et qui dispose d’un potentiel productif important». Ledit rapport mentionne effectivement le manque de coordination entre les différents bailleurs de fonds et le retrait de certains d’entre eux du secteur agricole, pourtant très stratégique. Il «emploie 70% de la population active et compte pour 30% du PIB».

Or, ces dernières années, l’agriculture dans cette région a été «fortement déstructurée par la croissance démographique, les sécheresses successives, l’insécurité et l’incurie de certains gouvernements». Ces facteurs ont fait que le potentiel agricole des pays sahéliens est sous-exploité. Ce qui a fait qu’en 2015 plus de 20 millions de personnes étaient concernées par «l’insécurité alimentaire».

Après l’agriculture, le même constat a été fait concernant le secteur industriel. L’industrie représente un taux inférieur à 10% du PIB de tous les pays aidés. Ce retard en matière de développement n’arrange pas les populations puisqu’il encourage les conflits politiques souvent violents. L’insécurité persiste dans cette région, notamment au nord et au centre du Mali.

Pour améliorer la situation, le rapport sénatorial a proposé de revoir l’approche globale sécurité/développement prônée notamment par l’Union européenne ; la lutte contre la mauvaise gouvernance et la corruption ; aider dans la réforme de la justice et du système éducatif ; venir en aide à la société civile, etc. Le rapport suggère, par ailleurs, l’accélération de la mise en œuvre de l’Accord d’Alger.

Ghezlaoui Samir (Alwatan via cridem)